Jean Nocher, Hitler est vivant, Le pamphlet atomique n° 5, 15 septembre-15 octobre 1947 – écrit à Paris, 15-18 août 1947, Illustrations de Colette Canty
Hitler est vivant : telle est la révélation que je vous apporte aujourd'hui.
Depuis plus de deux ans, l'Intelligence Service britannique, l'O.S.S. Américain, le 2e Bureau français et la Section allemande du N.K.V.D. Russe se sont livrés à des investigations gigantesques pour « résoudre l'énigme », comme disent nos reporters spécialisés dans les grands crimes et dans les petites fautes de langage...
[…]
La vérité est qu'Hitler est vivant – et en pleine santé : j'en apporte ici la preuve décisive, et je nommerai les pays où le Führer de toutes les Allemagnes se promène en liberté, à la barbe des hommes et des femmes qui ont souffert dans leurs amours et dans leur chair pour abattre le monstre. Hitler est non seulement en vie, mais il est présent dans les pensées et dans les actes des nouveaux maîtres du monde […].
Je vais prouver qu'Hitler est le premier acteur du drame terrible dont nous sommes les futures victimes, et je démontrerai que ce génie du mal a déjà presque réalisé son rêve de fou, qu'il assiste avec insolence à de nombreux conseils internationaux, qu'il a introduit ses hommes dans presque tous les gouvernements, et que s'il a peut-être perdu la bataille d'Allemagne, il a sans doute déjà gagné la guerre – la guerre mondiale, la guerre qui vient.
Je vous dirai où se cache Hitler, je vous mènerai jusqu'à lui ; et je vous inviterai à lui donner enfin le dernier coup : le coup de grâce...
Mais d'abord : a-t-il perdu la bataille d'Allemagne ?
Entre 1933 et 1947, l’Allemagne a grandi en population de 67 à 75 millions d'habitants – alors que plus de vingt millions de personnes ont disparu du seul fait de la guerre, sa puissance industrielle a considérablement augmenté. Son armée s'est reconstituée sous l'égide de Yalta * et de Staline.
* [note de Jean Nocher] c'est en revenant de Yalta que Roosevelt prétendit siffler le Général de Gaulle comme un subordonné pour lui signifier après coup les décisions prises sans la France...
Qu'on ne nous raconte pas d'histoires en voulant refaire l'Histoire : Allemands nazis ou Allemands cocos, ils resteront toujours les boches que nous avons connus à Oradour, dans le Vercors, à Buchenwald ou à Staraïa-Russia. Le gris-vert de l'uniforme et le rouge sang de la faucille se mêleront harmonieusement pour reconstituer le brun de l'ancienne chemise d'Hitler, qui est la livrée-maison de l'Allemagne éternelle.
Le rêve d'Hitler est devenu réalité des rives de l'Europe jusqu'à Vladivostok.
Je demande ici à tous les camarades qui fondèrent avec nous, jadis, le Comité antifaciste d'Amsterdam-Pleyel, […] le Secours Rouge [...], à tous ceux qui combattirent avec Borodine [...], à tous ceux qui s'envolèrent avec la Brigade Malraux pour que ne meure pas la Liberté en Espagne, à tous nos camarades F.T.P. [de garder] notre fidélité à l'Homme : ce n'est pas nous qui avons trahi nos premières amours.
[...]
Nous sommes les derniers hommes libres d'Europe.
Le monstre s'est camouflé.
Nous somme écœurés des horreurs, des haines, des tortures, des charniers, de ces mares de honte et de sang où baignent encore nos maisons écrasées. Nous sommes las de voir tomber les meilleurs, et nous voudrions tant voir grandir nos fils dans la vie simple et tranquille...
Voilà pourquoi, amis, nous vous appelons à la croisade contre le nouvel Antéchrist. La peste brune ronge cette terre promise à notre lumière. Désintoxiquez-vous, braves gens ! Vous savez à présent où est le mal : Hitler est en vous. Je vous avais promis de vous mener à lui : je vous ramène finalement à vous-même – à votre libre-arbitre.
Qui, aujourd'hui, régit le Bestiarium ? Qui gouverne la société humaine, la finance, l'industrie, l'armement ?
L'Histoire peut se répéter en s'inversant.
On se souvient qu'en temps d'Occupation, les Collaborateurs sont à l’œuvre.
Nous en sommes là, et notre civilisation occidentale doit savoir si elle va s'incliner devant les diktats de ceux dont l'éthique se résume en un mot : « réussir ».
[...]
Nous remettrons ce monde à l'endroit en remettant l'Homme debout.