Un bloc-notes sur la toile. * Lou, fils naturel de Cléo, est né le 21 mai 2002 († 30 avril 2004).
Julie Van Rechem, Prof jusqu'au bout des ongles, Stock, 2015 – couverture : Pierre Martin Vielcazat (STALLES)
Ce livre est celui que j’aurais aimé lire avant ma première rentrée des classes en tant qu’enseignante. Une voix qui m’aurait prévenue que ce métier est si humain qu’il vous bouleverse régulièrement. Une voix qui m’aurait empêchée de confondre l’institution, cadenassée et sclérosante, avec l’excitation et la gourmandise à faire progresser ses élèves. Une voix qui parle d’une expérience personnelle, sans généraliser, et qui rappelle que rien n’est jamais dénitif : ni le fait d’utiliser des manuels en classe, ni le fait que certains élèves s’évertuent à écrire en turquoise…
Futur ou ancien prof, parent d’élève ou même élève : j’aimerais que le lecteur referme mon livre en se rappelant que l’amertume et la grogne justiée des enseignants ne doit jamais faire oublier l’ardeur qu’ils mettent en entamant chaque heure de cours.
Selon l'éditeur
Julie Van Rechem est professeur d’histoire-géographie-éducation-civique-juridique-et-sociale en collège, au nord de Paris. Après sa première année, décevante, elle est partie pour l'Inde où elle a enseigné et s’est ressourcée pendant six ans. Elle est revenue pour notre bonheur et celui de ses élèves.
Ecoutez Julie.
France Culture, Rue des écoles, présentation : Louise Tourret, dimanche 15 novembre 2015
Prof n'est pas un essai sur l'enseignement, c'est le récit d'une (jeune) vie.
Dans l'extrait de Rue des écoles, on a entendu parler de peur. Qui a peur ?
Peur sur la classe
Durant ma formation, j'avais reçu d'excellents conseils pour organiser une séquence de cours sur la Méditerranée au XIIe siècle pour des secondes. En revanche, je n'avais aucune idée de ce qui me permettrait de créer un climat de confiance avec une classe, et encore moins une classe composée d'élèves venant d'un milieu radicalement différent du mien et aux habitudes scolaires aux antipodes de celles auxquelles j'étais rompue. Soyons clair : je n'avais aucune idée de la manière dont je devais m'adresser à eux ou dont je devais leur faire cours. J'avais seulement reçu çà et là le même conseil érigé en règle ultime de l'éducation prioritaire : j'allais devoir « les visser ». La métaphore bricoleuse ne s'expliquant pas, on la laisse parler d'elle-même et de ce fait personne n'a jamais su au fond ce qu'elle signifiait.
L'enseignement n'est pas un bricolage.
Julie n'a pas connu que de doux agneaux en classe mais le rapace n'est-il pas le grand prédateur de l'établissement, du rectorat, du ministère ?
Les gamins trichent ou tchipent, il faut être avec eux, devant eux.
Après six ans de vagabondage, elle revient sur les planches, les ongles vernis de bleu. En scène, il faut porter un masque.
Une classe est une chose mouvante, fluctuante, enthousiasmante, blessante, épuisante.
L'autorité maternelle... Même au collège les élèves disent encore « Maman » en appelant le professeur. Ce sont des Pikachus. Ils ont découvert leur histoire au musée Guimet, puis sont allés se rouler dans l'herbe du Trocadéro. Pikachus...
Le travail, tout travail, est épuisant. Chez les profs, c'est la voix qui casse. Et comme Lao-Tseu l'a dit, il faut chercher la voie...
Le théâtre apprend à poser la voix, à prendre une voix de masque qui permet de se faire entendre d'une large assemblée sans s'égosiller – une voix douce.
Pourquoi choisir l'enseignement de l'histoire ? Un souvenir d'enfance, « L'Histoire selon Dingo » – il y avait un épisode dans presque chaque Super Picsou géant.
Les perles...
Pourquoi Hitler s'est-il suicidé ?
– Ben ché pas, […] parce que les autres allaient le tuer de toute façon alors...
Le professeur est un mystère, les élèves épient leur professeur pour percer le mystère de sa vie privée... où l'on trouve la machine à café, outil pédagogique essentiel, toujours en panne – c'est bien connu.
La vie avec un prof est un enfer. Le prof envahit tout l'espace avec ses livres, ses documents, ses copies.
Ensuite, il y a les attentats, que dire ?
A lire, d'autant que l'humour épice avec juste ce qu'il faut l'ensemble..., nous dit Des Pas perdus.
Julie Van Rechem, l'invitée de La Matinale sur LCI