Gérald Sibleyras, Le Banc, mise en scène : Christophe Lidon, int. : Philippe Chevallier et Régis Laspalès, Théâtre Montparnasse, 25 mars-31 mai 2008
Paul et Vladimir, un pianiste à quatre mains depuis vingt ans, ont reçu un prix pour leur dernière interprétation et une résidence artistique en vue de travailler leur prochaine tournée au Japon. Le Tyrol, un chalet, Rostropovitch, ancien résident – on l'entend encore, la montagne – Trüdi, jeune et voluptueuse cuisinière en coulisses, peluche italo-autrichienne, avec un umlaut, le paradis, quoi… Seulement, ils parlent, l'un fléchit, l'autre s'infléchit dans une aventure alpestre avec Trüdi et le banc rétrécit. Finalement, comme il est dit : il ne se passe rien – rien d'autre qu'un jeu de scène, en attendant…
Chevallier et Laspalès sont deux clowns, un Blanc et un Auguste, les artistes emblématiques du cirque traditionnel. Le rôle noble revient au second, le premier n'étant qu'un faire-valoir (au demeurant essentiel !), un second rôle qui, pris de vertige dans le tableau, se rebelle et – est-ce un effet du vertige ? – tombe en dépression.
L’Auguste doit faire rire dès son entrée, par quelques mots sans importance, ou une annonce tragique (je vais me détruire – Pierre Desproges) ou un appel déchirant (maman ! – Guy Bedos), ou même par le silence (Coluche, prenant deux à trois minutes, selon les soirs, avant de lancer : c'est l'histoire d'un mec... vous la connaissez ?).
La pierre et le ciment se sont déjà distingués, la colle ne tient plus. La scène de ménage – c'est de l'amour – se poursuit sur le même ton jusqu'à la fin vertigineuse, comme une fugue inversée, où Paul entend Rostropovitch – alors qu'il a déclaré, dès le commencement : Rostropovitch est mort.
En entendant Rostropovitch… en attendant Godot ? c'est vous qui entendez.
La pierre et le ciment
L'empiètement