Un bloc-notes sur la toile. * Lou, fils naturel de Cléo, est né le 21 mai 2002 († 30 avril 2004).

F. Scott Fitzgerald, Gatsby le Magnifique – la petite lueur verte au bout du ponton

 

Un souci de lecture ? Un clic !

 

F. Scott Fitzgerald, Gatsby le Magnifique

F. Scott Fitzgerald, Gatsby le Magnifique – The Great Gatsby, 1925 , traduit de l'anglais États-Unis par Michel Laporte, Hachette, 2013

 

F. Scott Fitzgerald, ca 1925

F. Scott Fitzgerald, ca 1925 Hulton Archive/Getty Images

 

F. Scott Fitzgerald, Gatsby le Magnifique, film

Baz Luhrmann, The Great Gatsbyint. Tobey Maguire, Leonardo DiCaprio, Carey Mulligan, Joel Edgerton, 2013

 

Porte le chapeau d'or si ça doit l'émouvoir ;

Si tu peux sauter haut, bondis pour elle, aussi,

Qu'elle crie : « Amour, amour chapeauté d'or qui saute haut,

Il faut que tu sois mien ! »

Thomas Parke d'Invilliers.

 

Long Island, New York, été 1922.

Nick Carraway, jeune diplômé, est venu s'installer à Long Island avec le projet de se consacrer au courtage en bourse. Sur West Egg, le quartier des nouveaux riches, il a trouvé une petite maison coincée entre deux énormes bâtisses qui se louaient douze ou quinze mille dollars la saison.

 

Long Island, The Guggenheim Estate, Sands Point, NY, c. 192

 

Celle de droite était une chose colossale à tous points de vue – c'était l'imitation fidèle d'un certain hôtel de ville de Normandie –, avec, sur un côté, une tour flambant neuve sous une mince barbe de lierre sauvage, une piscine en marbre et plus de seize hectares de pelouses et de parc. C'était la demeure de Gatsby.

[…]

De l'autre côté de la baie minuscule, les palais blancs du secteur à la mode d'East Egg scintillaient le long de l'eau, et l'histoire de cet été-là commence ce soir où je m'y rendis pour dîner avec les Tom Buchanan.

 

Gatsby incarnait la richesse, et pourtant, malgré sa répulsion, Nick le disait : « il y avait en lui quelque chose de magnifique ».

Daisy Buchanan était une petite cousine de Nick et Tom, une connaissance depuis l'université. Sa famille était colossalement fortunée.

 

Long Island, Groton Farm

 

Leur maison était encore plus recherché que je l'avais imaginé, une grande bâtisse chaleureuse, rouge et blanche, de style néo-colonial, qui dominait la baie.

 

Daisy est en compagnie de Jordan Baker, une « équilibriste » – elle se prépare pour le tournoi de Westchester.

Au cours du dîner, on entend :

La civilisation part en miettes ! intervint Tom avec violence. J'en suis arrivé à être terriblement pessimiste à propos de tout. As-tu lu L'Ascension des Empires de Couleur, de ce type, là, Goddard ?

Ma foi, non ! Répondis-je, assez surpris par son ton.

Eh bien ! c'est un bon livre et chacun devrait le lire. L'idée est que, si nous n'y prenbons pas garde, la race blanche sera... sera totalement submergée. C'est un fait scientifique, c'est prouvé.

 

Jordan apprend à Nick : « Tom voit une femme à New York. »

 

Daisy se confie à son cousin : « – Eh bien ! j'ai eu des moments très pénibles, Nick, et je suis devenue joliment cynique à propos de tout. »

 

Depuis le train, on voit les immondices cachés de la ville.

A mi-chemin entre West Egg et New York, la route rejoint brusquement la voie ferrée et la longe pendant un quart de mile, comme pour se tenir au plus loin d'un lieu particulièrement désolé. C'est une vallée de cendres […].

[...]

Les yeux du docteur T.J. Eckleburg sont bleus et gigantesques.

Ils veillent sur la route depuis l'immense panneau d'un oculiste disparu.

 

Un dimanche, Tom emmène Nick à New York par le train et l'invite, en cours de route, à faire la connaissance de sa petite amie, Myrtle, une femme un peu corpulente, sans le moindre éclat de beauté, mariée à un garagiste stupide, Georges B. Wilson. Tom demande à Myrtle de les suivre, sous le prétexte d'aller voir sa sœur.

A l'appartement alloué à ses escapades viennent se joindre Catherine, la sœur, le voisin du dessous, Chester McKee, et sa femme, Lucille. Tout est clinquant, médiocre, vulgaire comme Myrtle.

Mme Wilson avait changé de toilette ; elle était désormais attifée d'une robe de cocktail sophistiquée en mousselin crème qui produisait un frou-frou constant quand elle naviguait à travers la pièce.

[...]

Ma chérie, dit-elle à sa sœur en criant d'une voix maniérée, la plupart de ces gens te rouleront chaque fois. Tout ce qu'ils ont en tête, c'est l'argent. J'ai eu une bonne femme qui est montée ici la semaine dernière pour s'occuper de mes pieds, et quand j'ai vu sa facture, tu aurais cru qu'elle m'avait opérée de l'appendicite !

Comment s'appelait cette dame ? demanda Mme McKee.

Mme Eberhardt. Elle vient s'occuper des pieds des gens à domicile.

[…]

A un moment, aux environs de minuit, Buchanan et Mme Wilson se firent face et discutèrent avec passion pour savoir si Mme Wilson avait le moindre droit de mentionner le nom de Daisy.

Daisy ! Daisy ! Daisy ! se mit à crier Mme Wilson. Je le dirai auitant que je voudrai ! Daisy ! Dai...

D'un geste bref et bien calculé, Tom lui cassa le nez avec le plat de la main.

Alors il y eut des serviettes ensanglantées sur le sol de la salle de bains, des voix de femmes qui grondaient et, par-dessus toute cette confusion, un long cri discontinu de douleur.

 

 

George Gershwin, Rhapsodie in blue, Paul Whiteman and his Concert Orchestra, Ross Gorman, George Gershwin, 1924

 

Il y a eu de la musique chez mon voisin tout au long des soirs d'été. Dans ses jardins bleus, des garçons et des filles allaient et venaient comme des papillons de nuit parmi les chuchotis, le champagne et les étoiles.

 

Tous les week-ends, le palais s'illumine et s'anime de danses, de lumières, de cocktails somptueux. Lorsque Nick, seul invité dans les formes – les autres viennent, simplement –, rencontre Gatsby pour la première fois, il remarque son sourire étonnant, un sourire rassurant.

Les légendes courent : il tient sa fortune du kaiser... un jour il a tué un homme... c'est un bootlegger... Cueille-moi une rose, mon chou, et verse-moi une dernière goutte dans le verre en cristal que voici, disent les jeunes femmes.

 

Un jour, Gatsby prétend parler franchement à Nick pour dissiper les rumeurs :

Je suis le fils de gens riches du Middle West... tous morts, à présent. J'ai grandi en Amérique mais, parce que mes ancêtres y allaient depuis de très nombreuses années, j'ai fait mes études à Oxford. C'est une tradition familiale.

Gatsby dit avoir besoin de sa confiance pour lui demander un grand service.

A midi, pour le déjeuner, Nick rejoint Gatsby avec Jordan Baker dans une cave de la 42e rue. Il croise Meyer Wolfshiem, un homme d'affaires (quelles affaires ?) en lien avec Gatsby, puis Tom, toujours en chasse.

Jordan, chargée de mission, fait part à Nick de la demande de Gatsby : il s'agit d'inviter Daisy à prendre le thé. Gatsby viendra... en voisin. Elle lui raconte qu'en 1917 Daisy a connu Gatsby. Il est parti à la guerre. Elle ne l'a pas revu. Elle a épousé Tom Buchanan – un mariage princier pour la presse. Le jour de ses noces, elle a reçu une lettre de Gatsby : il parlait de son absence et annonçait son retour.

Elle a pleuré et pleuré.

Il est venu s'installer à East Egg, juste en face de chez les Buchanan, de l'autre côté de la baie, pour Daisy...

 

Quand je suis rentré chez moi ce soir-là, j'ai craint, un moment, que ma maison ne soit en feu. Deux heures du matin, et toute la pointe de la péninsule était embrasée d'une lueur qui tombait de façon irréelle sur les massifs d'arbustes et faisait s'étirer des étinvcelles sur les fils le long de la route. Au sortir d'un virage, j'ai vu que c'était la maison de Gatsby qui était éclairée de la cave au grenier.

 

Le surlendemain, Daisy et Gatsby se retrouvent – tous les deux embarrassés. Gatsby invite Nick et Daisy à visiter la maison.

 

Avec des murmures de ravissement, Daisy a admiré tel ou tel aspect de la silhouette féodale qui se détachait sur le ciel, admiré les jardins, l'odeur pétillante des jonquilles, celle, vaporeuse, des aubépines et des fleurs de pruniers et celle, pâle et dorée, du chèvrefeuille d'hiver.

 

 

Elizabeth Grant, Rick Nowels, Young and Beautiful, int. Lana Del Rey, 2013

 

Luxe, volupté, musique.

 

Nick s'éclipse, en les laissant là ensemble.

 

Plus tard, on apprend la vie rêvée conçue depuis son enfance par Jay Gatsby, James Gatz, fils de fermiers pauvres, sans éducation, livré à l'errance jusqu'à sa rencontre avec Dan Cody, un millionnaire qui court les mers sur son yacht, et les femmes. Il le sauve d'un naufrage probable et reste auprès de lui pendant cinq ans – serveur, secrétaire, pilote, jusqu'à sa mort. La dernière femme reçoit l'héritage. Jay Gatsby se retrouve dans la misère il a seulement appris à paraîtreen société.

L'été suivant, il est à la Une des journaux : d'où vient sa fortune ?

 

Gatsby voit Daisy régulièrement. Elle voudrait s'enfuir, il voudrait revivre le passé.

 

Ensuite... Un soir... Une virée dans le centre... Myrtle Wilson s'enfuit... Dans la nuit... Sous les yeux de l'oculiste... Daisy...

 

Tandis que j'étais assis là, à ruminer sur cet ancien monde inconnu, j'ai songé à l'émerveillement de Gatsby, quand il avait découvert la petite lueur verte au bout du ponton de Daisy.

[…]

Gatsby avait foi en la lueur verte, le futur orgastique qui, année après année, recule devant nous. Il nous a échappé ? Peu importe : demain nous courrons plus vite, nous étendrons plus loin nos bras... Et par un beau matin...

Ainsi louvoyons-nous, barques à contre-courant, ramenés sans cesse dans le passé.

 

* * *

 

Nick Carraway écrit ce qu'il a vécu. Il le dit lui-même : il est à la fois dedans, un personnage, et dehors, un observateur – qui écrit.

Des couples se forment : Daisy et Jay, Tom et Nick, Fitzgerald et Zelda.

Parmi les personnages, il est un figurant muet qui anime toute la machine : l'alcool – une fortune pour quelques uns, la misère pour d'autres.

 

Le film apparu en 2013 est un produit éblouissant – ce qui veut dire qu'on y perd la vue si l'on n'est pas déjà aveugle, comme des critiques en délire (et non des moindres) – pratiquement tous, sauf les Américains...

C'est chic, clinquant, canaille – tout ce que marque le roman.

Au générique, la section Digital effets / Visual effects est plus longue que tout le reste : cela se voit à l'écran.

Laissons reposer la sauce rap. Il y a Gershwin, qui n'est pas d'époque (de l'époque du film) et deux ou trois chansons intéressantes, que l'on n'entend pas, ou pas vraiment, au cours du film.

Ce qui est très bien, c'est le texte : il est de F. Scott Fitzgerald, un écrivain.

 

* * *

 

N'oubliez pas. N'oubliez pas vos mouchoirs, parce qu'il y a tout de même l'histoire, une histoire de F. Scott Fitzgerald, un écrivain. Prenez de vrais mouchoirs, à ce point-là ! vous éviterez la déforestation de la planète.

 

Pour les cœurs sensibles, une histoire vraie, comme celle de Fitzgerald.

 

 

Amy Winehouse, Mark Ronson, Back to Black, 2006

 

_ _ _

 

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Y
<br /> Pas encore vu le film mais le romanest TELLEMENT triste, je ne m'y attendais pas... dieu sait pourquoi, j'avais pourtant déjà lu l'auteur, peut être à cause du titre qui nous promet de brillant,<br /> du panache et de la fête... j'aurais dû me douter :-)<br />
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L
<br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Le film n'apporte rien. Même l'image ne donne pas le décor aussi bien qu'une carte postale ancienne. De toute façon, la lecture est un exercice de mouchoir : pour essuyer ses larmes, même quand<br /> on pleure de rire, ou pour éponger la sueur qui perle au détour de l'action...<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> Je n'ai pas osé aller voir le film. Quand j'ai lu un bouquin, surtout quand je l'ai aimé, je crains d'être déçu ensuite en regardant son adaptation.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Sinon, je note une certaine appétance pour les belles demeures. Aurais-tu été agent immobilier de la jet-set dans une autre vie ?<br />
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L
<br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Les belles demeures (anciennes) sont de celles qui ont pu inspirer Fitzgerald.<br /> <br /> <br /> Autrement, je présente de belles maisons lorsqu'elles sont suggérées par un roman ou une série : Une rose pour Emily, Le démon de midi (c'était en juillet : une oeuvre<br /> édifiante, et sociale), Le Thérondelle aux îles Caïman et à Saint-Kitts and Nevis.<br /> <br /> <br /> Quant au film, c'est le Titanic - d'ailleurs, c'est la même histoire...<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> Tu m'aurais dit "old sister", j'aurais capté !!! Pas besoin de coupe, j'ai des "dragibus" anti-douleurs qui me lettent déjà la tête à l'envers et comme je suis en sevrage, bonjour les dégâts !<br /> Warf ! J'aime que l'on garde le côté désuet des expressions, comme "c'est épatant" !!! Entre autres...<br />
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L
<br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Epatant, oui, ça se perd. Comme les eaux de régime. Epatant se portait à Vichy.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> wARF ! Merci pour le compliment !!! <br />
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L
<br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Vieux frère est la traduction choisie par Michel Laporte pour Old sport, la formule préférée de Gatsby.<br /> <br /> <br /> Dans la version française du film, cela devient Mon vieux, qui n'a pas le parfum suranné (et de là, oxfordien) recherché par Gatsby.<br /> <br /> <br /> Encore une petite coupe ?<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> J'ai eu le message de Natiora avec le lien menant vers ce superbe billet ! Waouh ! Bravo pour le choix des photos. L'âme de Fitzgerald est passée dans ce billet ... Il va falloir que je me remtte<br /> à lire ses nouvelles, j'en ai quelques unes dans ma PAL !!!^^ Merci pour ta participation, je t'inscris en Zelda (1ère catégorie), on verra par la suite si tu lis autre chose !!!^^<br />
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L
<br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Bien, vieille sœur ! : - )<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />