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  • : Un bloc-notes sur la toile. * Lou, fils naturel de Cléo, est né le 21 mai 2002 († 30 avril 2004).

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23 février 2013 6 23 /02 /février /2013 00:01

 

Jules Barbey d'Aurevilly, Le Chevalier Des Touches

Jules Barbey d’Aurevilly, Le Chevalier Des Touches, 1863, édition Le club français du livre, 1963

 

Jules Barbey d'Aurevilly 357

Nadar, Jules Barbey d’Aurevilly, 1860-1865

 

C’était vers les dernières années de la Restauration. La demie de huit heures, comme on dit dans l’Ouest, venait de sonner au clocher, pointu comme une aiguille et vitré comme une lanterne, de l’aristocratique petite ville de Valognes.

Le bruit de deux sabots traînants, que la terreur ou le mauvais temps semblaient hâter dans leur marche mal assurée, troublait seul le silence de la place des Capucins, déserte et morne alors, comme la lande du Gibet elle-même. Tous ceux qui connaissent le pays, n’ignorent pas que la lande du Gibet, ainsi appelée parce qu’on y pendait autrefois, est un terrain, qui fut longtemps abandonné, à droite de la route qui va de Valognes à Saint-Sauveur-le-Vicomte, et qu’une superstition traditionnelle la faisait éviter au voyageur… Quoiqu’en aucun pays, du reste, huit heures et demie ne soient une heure indue et tardive, la pluie qui était tombée, ce jour-là, sans interruption, la nuit, — on était en décembre, — et aussi les mœurs de cette petite ville, aisée, indolente et bien close, expliquaient la solitude de la place des Capucins et pouvaient justifier l’étonnement du bourgeois rentré, qui peut-être, accoté sous ses contrevents strictement fermés, entendait de loin ces deux sabots, grinçants et haletants sur le pavé humide et au son desquels un autre bruit vint impétueusement se mêler.

 

Valognes, murs

 

Valognes, petite ville bien close, avec ses vieilles demeures retranchées derrière de hauts murs lézardés par le temps et laissant entrevoir une végétation impénétrable au regard du passant tout en permettant aux indolents aisés d'observer la rue sans être vus.

 

Valognes, plan 

Valognes, de nos jours : où l'on pourra suivre ces deux sabots jusqu'à la porte des demoiselles de Touffedelys

 

La lande du Gibet

La lande du Gibet, devenue lieu de sédentarisation des nomades dans les années '30 et '40

 

On observera, sur le plan, le tracé des croisements en trivium, dont la tradition s'est établie dans les bourgs ruraux.

 

Trivium – (1797) Du latin trivium qui signifie proprement « embranchement de trois voies », c’est en particulier le carrefour des petits villages créés spontanément par l’homme, sans l’aide des augures qui prônent un plan en croix, sur l’axe céleste nord-sud. De là le sens de « place publique commune », surtout par rapport au forum, le seul que l’adjectif français trivial ait gardé.

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition, 1932-1935

 

La personne aux sabots, l'abbé de Percy, vient de Saint-Sauveur-le-Vicomte. Elle est passée devant la lande du Gibet. Elle entre dans Valognes par la voie aujourd'hui nommée « rue Barbey d'Aurevilly ».

 

Valognes, Hôtel de Beaumont

Hôtel de Beaumont

 

Valognes, hôtel du Mesnildot de la Grille

Hôtel du Mesnildot de la Grille – aujourd'hui, Sainte-Marie, école et collège privés, rue des Religieuses

 

Valognes, rue des Religieuses

rue des Religieuses

 

Sans doute, en tournant la place, sablée à son centre et pavée sur ses quatre faces, et en longeant la porte cochère vert-bouteille de l’hôtel de M. de Mesnilhouseau, qu’on avait, à cause de sa meute, surnommé Mesnilhouseau des chiens, les sabots qu’on entendait réveillèrent cette compagnie des gardes endormie, car de longs hurlements éclatèrent par-dessus les murs de la cour et se prolongèrent avec la mélancolie désolée qui caractérise le hurlement des chiens dans la nuit.

[...]

cette place solitaire, qui n’était pas grande, il est vrai, mais qui, de riante qu’elle était autrefois, quand elle ressemblait à un square anglais, avec ses arbres plantés en carré et ses blanches balises, était devenue presque terrible depuis qu’en 182… on avait dressé au milieu une croix sur laquelle, colorié grossièrement, se tordait, en saignant, un Christ de grandeur naturelle.

 

« Quand je donne un nom inventé à mes personnages, je l'invente comme on coule un verre. Je le veux transparent, – voilant et dévoilant le Nom Réel que je n'écris pas. J'ai connu à Valognes un M. de Mesnildot des Chiens [...]. Ce nom de Mesnildot, je l'ai indiqué dans ce nom de Mesnilhouseau. »

Lettre à Trébutien du 17 décembre 1854

 

Valognes, Des Touches, Félix Buhot

Gravure de Félix Buhot, 1879 (la couleur est celle de notre édition) : on distingue, sous le Christ, la silhouette du chevalier Des Touches de Langotière

 

De la rue Siquet au milieu de la place des Capucins, la lanterne qui projetait sa pointe de lumière sous le parapluie incliné s’éteignit, juste en face du grand Christ. Et ce n’était pas le vent qui l’avait soufflée, mais une haleine ! Les nerfs d’acier qui tenaient cette lanterne l’avaient élevée jusqu’à la hauteur de quelque chose d’horrible, qui avait parlé. Oh ! ce n’avait pas été long ; un instant ! un éclair ! Mais il est des instants dans lesquels il tiendrait des siècles ! C’est à ce moment-là que les chiens avaient hurlé. Ils hurlaient encore, quand une petite sonnette tinta à la première porte de la rue des Carmélites, qui est à l’extrémité de la place, et quand la personne aux sabots entra, mais sans sabots, dans le salon des demoiselles de Touffedelys, qui l’attendaient pour leur causerie du soir.

[...]

Aux deux côtés d’une cheminée en marbre de Coutances cannelée et surmontée d’un bouquet en relief, ces deux demoiselles de Touffedelys, droites sous leurs écrans de gaze peinte, auraient pu très bien passer pour des ornements sculptés de cette cheminée, si leurs yeux n’avaient pas remué et si ce que venait de dire l’abbé n’avait terriblement dérangé la solennelle économie de leur figure et de leur pose.

 

Au salon, Sainte et Ursule de Touffedelys devisent en compagnie du Baron Hylas de Fierdrap et de Barbe-Pétronille de Percy, la sœur de l'abbé qui vient de rencontrer un revenant :

au sortir de la rue Siquet et quand j’ai tourné le coin de la place, ramassé sous mon parapluie pour éviter le vent qui me fouettait l’averse au nez, j’ai tout à coup senti une main qui m’a saisi le bras avec violence, et je t’assure, Fierdrap, que cette main-là avait quelque chose de très corporel, et j’ai vu, à deux pouces de ma figure et dans le rayon de ma lanterne, car presque tous les réverbères de la place étaient éteints, un visage… est-ce croyable ? sur mon âme, plus laid que le mien ! un visage dévasté, barbu, blanchi, aux yeux étincelants et hagards, lequel m’a crié d’une voix rauque et amère : « Je suis le chevalier Des Touches ; n’est-ce pas, que ce sont des ingrats ? »

[...]

le quart après neuf heures, Aimée-Isabelle de Spens, comtesse de Spens, marquise de Lathallan, rejoint l'assemblée.

[...]

celle qu’ils nommaient mademoiselle Aimée, et qui allait décider de leur soirée, ouvrit la porte sans qu’on l’annonçât, et entra.

[…]

Ne vous dérangez donc pas, fit une voix fraîche du fond de la cape rabattue d’un mantelet, car la nouvelle arrivée était entrée dans le salon comme elle était venue, n’ayant laissé dans le corridor que ses patins. Elle répondait plus aux mouvements qu’aux paroles de ses amies. Je ne suis pas mouillée, ajouta-t-elle, je suis venue si vite et le couvent est si près !

Et, pour prouver ce qu’elle disait, elle pencha, dans le jour ambré de la lampe, son épaule, où quelques gouttes d’eau perlaient sur la soie de son mantelet. Le mantelet était d’un violet sombre, l’épaule était ronde, et les gouttes d’eau tremblaient bien, à cette lueur de lampe, sur cette rondeur soyeuse. On eût dit une grosse touffe de scabieuses où fussent tombés les pleurs du soir.

 

Il y a plus d'une touffe dans l'histoire.

Touffe de scabieuses, touffes de roses... aux yeux de qui savait voir, cette vieille fille valait mieux à son petit doigt sans anneau qu’à tout leur corps, dans leurs robes de noce, les plus jeunes châtelaines de ce pays, dont les femmes ressemblent pourtant aux touffes de roses des pommiers en fleurs !

touffes de lys... ces armoiries charmantes et parlantes des Touffedelys, qui portent, comme vous le savez, de sinople à trois touffes de lys d’argent, avec la devise au jeu de mots héroïques : ILS NE FILENT PAS.

et des fleurs... Si mademoiselle Aimée avait été brune, pas de doute que déjà, sur ces nobles tempes qu’elle aimait à découvrir, quoique ce ne fût pas la mode alors comme aujourd’hui, on eût pu voir germer ces premières fleurs du cimetière, comme on dit des premiers cheveux blancs que le temps, dans de cruels essais, nous attache au front brin à brin, en attendant que le diadème mortuaire qu’il tresse à nos têtes condamnées soit achevé ! Mais mademoiselle Aimée était blonde.

Nous avions partout remplacé les lys par des lilas. Des lilas, c’est peut-être des lis en deuil ?

fleur de farine, dont les Douze saupoudrent leurs chapeaux pour se fondre dans la foule, au cours de leur première expédition.

[…]

C’est dont quelque chose de bien terrible pour mademoiselle Aimée, ce que vous allez raconter. J’avais bien ouï dire autrefois qu’elle avait perdu son fiancé dans la fameuse expédition des Douze...

 

Mademoiselle de Percy commence son récit, l'Histoire des Douze : je me sens obligée, avant d’entrer dans mon histoire, de vous rappeler ce qui se passait en cette partie du Cotentin, vers la fin de 1799.

 

Vers la fin de 1799, le chevalier Des Touches est courrier, agent de liaison, ayant mission de porter les dépêches échangées entre les derniers Chouans et les émigrés partis pour l'Angleterre. A bord d'un simple canot, il brave les Bleus et les flots.

 

Je ne vous peindrai pas le chevalier… Vous le disiez, il n’y a qu’un instant, à mon frère, vous l’avez connu à Londres et vous l’appeliez la belle Hélène, beaucoup pour son enlèvement, et un peu aussi pour sa beauté ; car il avait, si vous vous en souvenez, une beauté presque féminine, avec son teint blanc et ses beaux cheveux annelés, qui semblaient poudrés, tant ils étaient blonds !

 

Les femmes en sont jalouses.

 

Un jour, dans une foire, à Bricquebec, j’avais vu le chevalier, traité de chouan avec insolence, sous une tente, faire tête à quatre vigoureux paysans, dont il tordit les pieds de frêne dans ses charmantes mains, comme si ç’avaient été des roseaux ! Je l’avais vu, pris brutalement à la cravate par un brigadier de gendarmerie taillé en hercule, saisir le pouce de cet homme entre ses petites dents, ces deux si jolis rangs de perles ! le couper net d’un seul coup et le souffler à la figure du brigadier, tout en s’échappant par un bond qui troua la foule ameutée autour d’eux ; et depuis ce jour-là, je l’avoue, la beauté de ce terrible coupeur de pouce m’avait paru moins efféminée !

 

Bricquebec

Bricquebec

 

Le chevalier Des Touches a été capturé par les Bleus après une trahison. Il est enfermé à la prison d'Avranches, puis transféré à celle de Coutances où il est condamné à mort.

La première expédition échoue, l'un des Douze est tué. La seconde expédition doit réussir : la guillotine est déjà dressée.

La troupe venant du château de Touffedelys, près d'Avranches, trouve asile à la ferme des Mauger, des paysans de La Varesnerie, l'un des Douze, près de Coutances.

     * On nous dit que le Mauger est le mauvais gérant. Il y en a, de nos jours, mais ces Mauger de La Varesnerie étaient de braves gens. Nous ne retiendrons pas cette fantaisie onomastique ; - )

 

Vive le Roi ! » fîmes-nous en entrant dans le cachot de Des Touches… Prisonnier une semaine à Avranches, prisonnier à Coutances depuis quelques jours, maltraité par ses ennemis, qui voulaient broyer son énergie sous les tortures de la faim et le montrer sur l’échafaud dans une déshonorante faiblesse, Des Touches était assis sur une espèce de soubassement de pierre, tenant au mur de la prison et qui avait la forme d’une huche ; lié de chaînes, mais fort calme.

Il savait les chances de la guerre comme il savait les inconstances de la vague, ce partisan et ce pilote ! Pris un jour, délivré l’autre, repris peut-être ! il avait usé cette pensée…

Eh bien, dit-il avec son beau sourire, — ce ne sera pas pour demain encore ! — Tenez, ajouta-t-il, déferrez cette main et je vous aiderai pour le reste ! »

 

Au cours de la sortie, M. Jacques, le fiancé d'Aimée, est abattu.

 

Messieurs, nous dit-il, le Roi vous doit un serviteur qui va recommencer son service. Ce soir, j’aurai repris la mer. Le soleil va bientôt décliner ; mais il est trop haut encore pour que nous puissions nous montrer sur les chemins réunis et en armes. Il faut nous égailler. Seulement dans deux heures nous pouvons nous rejoindre à ce moulin à vent qui est ici à votre droite, sur une hauteur et qui la couronne, et je vous y donne rendez-vous.

C’est le Moulin bleu, dit La Varesnerie.

Bleu, en effet, reprit sombrement Des Touches, car c’est dans ce moulin-là, messieurs, que les Bleus m’ont pris par trahison et vous ont donné la peine de me reprendre. J’ai juré dans mon cœur que je leur payerais, argent comptant, cette peine qu’ils vous ont donnée. J’ai juré, — fit-il d’une voix éclatante comme un cuivre, — que je vengerais la mort de M. Jacques. Vous verrez si je tiendrai mon serment ! Avant que ce soleil, qui dit trois heures d’après-midi, ait disparu sous l’horizon, et moi dans la brume des côtes d’Angleterre, je vous donne ma parole de Chouan que le Moulin bleu sera devenu le Moulin rouge, et que, dans la mémoire des gens de ces parages, il ne portera plus d’autre nom ! »

 

D'une main, Des Touches se saisit du meunier, le Judas qui m'a livré aux Bleus ! Il l'attache à une aile du moulin, qu'il avait retenue de l'autre main, et le fait tourner vivement, avant de l'abattre, sur la demande de ses compagnons pris de pitié à cet horrible spectacle.

Le Moulin bleu se couvre de sang.

 

Aimée est veuve et vierge. Vers les dernières années de la Restauration, elle s'est retirée au couvent proche de la maison des Touffedelys.

 

D'où lui vient cette rougeur irrésistible lorsqu'elle entend parler du chevalier ?

Elle lui a sauvé la vie. Elle le cachait dans sa maison. Un soir, les Bleus, qui le filaient toujours, se sont placés en embuscade devant la maison. Ils ont vu Aimée, cette demoiselle chaste et pure et pudique, se déshabiller, se mettre nue, à l'heure du coucher.

Vingt ans après, le chevalier se souvient.

Ah ! reprit-il, elle pria Dieu… entr’ouvrit les rideaux pour qu’ils la vissent bien… C’était l’heure de se coucher… Elle se déshabilla. Elle se mit toute nue. Ils n’auraient jamais cru qu’un homme était là, et ils s’en allèrent ! Ils l’avaient vue…. Moi aussi…. Elle était bien belle… rouge comme les fleurs que voilà ! désignant les fleurs du parterre. »

 

= = =

 

De quoi est-il question ?

 

Une narration peut être conduite de trois points de vue :

- le point de vue universel (on dit aussi point de vue de Dieu ou focalisation 0) : le narrateur est omniscient et omniprésent ;

- le point de vue (ou focalisation) externe : le narrateur décrit ce qu'il perçoit, il ne connaît les sentiments des autres personnages que par leur manifestation objective ;

- le point de vue (ou focalisation) interne : le narrateur dit ce qu'il ressent et parle des autres personnages de son point de vue et non objectivement.

 

Le narrateur premier de notre aventure n'est pas un personnage, semble-t-il : il connaît tout et en tout lieu, mais il n'est pas dans l'action, semble-t-il.

La narratrice de l'Histoire des Douze, mademoiselle de Percy, raconte ce qu'elle a vu et entendu. Elle était de la seconde expédition.

Dans les dernières pages, le narrateur premier parle à la première personne : « Je... ».

Il révèle la présence d'un témoin jusque-là occulté, un enfant qui se tenait sagement près de la cheminée, dans le salon des demoiselles.

Cet enfant, dont la mémoire autorise le récit, part en quête du chevalier Des Touches, vingt ans après la soirée. Il le rencontre (on n'en dira pas plus).

 

De 1845 à 1852, [Jules Barbey] a écrit Une vieille Maîtresse, les Prophètes du passé, le Dessous de Cartes, l'Ensorcelée, il a commencé à penser à une autre œuvre normande : le Chevalier Des Touches.

Jean-Pierre Seguin (dans notre édition)

 

Qui est cet enfant, témoin d'une mémorable narration ?

 

Jules Amédée parle de son histoire, de Valognes, la « bourgade » qu'il connaît bien, cette petite ville aisée, indolente et bien close, éternelle, une petite ville sans histoire...

 

* * *

 

Clin d'oeil à Yueyin qui nous promet Le Bonheur dans le crime.

 

Remerciements à notre correspondant de guerre, qui a chouannement accompagné nos tribulations.

 

Le titre rappelle deux sœurs jumelles, les demoiselles de Rochefort, de l'immense Jacques Demy. La semaine prochaine, nous partirons en travelling avec Lola.

 

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17 février 2013 7 17 /02 /février /2013 00:01

 

 

Scène 1

Кафе Пушкинъ, Москва

 

_On dit : les riches... Les pauvres ont les mêmes droits que les riches.

_Tu crois ?

_Ils ont le droit de devenir riches.

_Tous ?

_Pourquoi pas ?

_Parce que...

_ Oui ?

_ Aristote et Confucius l'ont dit, pour faire un riche, il faut des pauvres.

_ Tu fais de la philosophie, maintenant ?



Financier

 

Сегодня, дамы

[sous-titrage : Lou]

… nous avons le financier.

_ Du Beluga ! Très frais !

_ Il frétille dans la glace.

_ Oui !

_ ...

_ Et puis, ça te fera oublier le Lomp de chez Mimile !

_ ...

_ Une Petrossian, pour accompagner !

_ Oui !

_ ...

_ Regarde autour de toi !

_ Je ne vois pas de pauvres.

_ Evidemment ! Tes voisins sont milliardaires.

_ Tu fais de la politique ?

_ J'ai mes pauvres, moi ! Je porte les épluchures aux Restos du cœur...

_ … avec la Mercedes ?

_ Nous avons beaucoup d'épluchures.

_

_ Il faut taper sur l'esturgeon tant qu'il est froid !

_ Tu repars ce soir ?

_ En fin d'après-midi. Avec le décalage horaire, je rentrerai pour le dîner. Anushka prépare merveilleusement le soudak.

_ On a le temps...

   

 

Scène 2

Dans la rue, un milliardaire déchu

 

_ Mesdames, je n'ai plus rien, je ne suis plus rien.

_ Vous êtes un pauvre, ce n'est pas rien ! 

 

 

* * * 

 

Le thérondelle

http://www.libellus-libellus.fr/article-29729004.html

 

Le thérondelle 02

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_02-a-va-casser-50786154.html

 

Le thérondelle 03

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_03-a-casse-de-partout-66024478.html

 

Le thérondelle 04

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_04-la-crise-n-est-pas-une-fatalite-66681861.html

 

Le thérondelle 05

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_05-banderille-ou-banderole-a-chie-de-partout-67717438.html

 

Le thérondelle 06

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_06-rondelle-ou-nuage-69437987.html

 

Le thérondelle 07

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_07-moi-j-aime-le-music-hall-et-charles-trenet-fukushima-03-70005841.html

 

Le thérondelle 08

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Le thérondelle 09

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Le thérondelle 10

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Le thérondelle 11

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Le thérondelle 12

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Le thérondelle 13

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Le thérondelle 14

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Le thérondelle 15

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Le thérondelle 16

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Le thérondelle 17

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Le thérondelle 18

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14 février 2013 4 14 /02 /février /2013 06:29

 

Jehan Rictus

Félix Valloton, Jehan-Rictus, in Remy de Gourmont, Le Livre des masques, vol. II, 1898

 

Le jeudi, c'est citation

 

Jehan Rictus, Les Soliloques du pauvre, 1897-1921

 

Je m’ dis : — Tout d’ même, si qu’y r’viendrait !

Qui ça ?... Ben quoi ! Vous savez bien,

Eul’ l’ trimardeur galiléen,

L’ Rouquin au cœur pus grand qu’ la Vie !

 

Délivre-nous de tout mal, Seigneur, et donne la paix à notre temps ; par la miséricorde, libère-nous du péché, rassure-nous devant les épreuves en cette vie où nous espérons le bonheur que tu promets et l'avènement de Jésus Christ notre Sauveur.

Liturgie de la communion

 

Le Revenant

I

I

 

Des fois je m’ dis, lorsque j’ charrie

À douète... à gauche et sans savoir

Ma pauv’ bidoche en mal d’espoir,

Et quand j’ vois qu’ j’ai pas l’ droit d’ m’asseoir

Ou d’ roupiller dessus l’ trottoir

Ou l’ macadam de « ma » Patrie,

 

Je m’ dis : — Tout d’ même, si qu’y r’viendrait !

Qui ça ?... Ben quoi ! Vous savez bien,

Eul’ l’ trimardeur galiléen,

L’ Rouquin au cœur pus grand qu’ la Vie !

 

De quoi ? Ben, c’lui qui tout lardon

N’ se les roula pas dans d’ beaux langes

À caus’ que son double daron

Était si tell’ment purotain

 

Qu’y dut l’ fair’ pondr’ su’ du crottin

Comm’ ça à la dure, à la fraîche,

À preuv’ que la paill’ de sa crèche

Navigua dans la bouse de vache.

 

Si qu’y r’viendrait, l’Agneau sans tache ;

Si qu’y r’viendrait, l’ Bâtard de l’ Ange ?

C’lui qui pus tard s’ fit accrocher

À trent’-trois berg’s, en plein’ jeunesse

(Mêm’ qu’il est pas cor dépendu !),

Histoir’ de rach’ter ses frangins

Qui euss’ l’ont vendu et r’vendu ;

Car tout l’ monde en a tiré d’ l’or

D’pis Judas jusqu’à Grandmachin !

 

L’ gas dont l’ jacqu’ter y s’en allait

Comm’ qui eût dit un ruisseau d’ lait,

Mais qu’a tourné, qui s’a aigri

Comm’ le lait tourn’ dans eun’ crém’rie

Quand la crémière à ses anglais !

 

(La crémièr’, c’est l’Humanité

Qui n’ peut approcher d’ la Bonté

Sans qu’ cell’-ci, comm’ le lait, n’ s’aigrisse

Et n’ tourne aussitôt en malice !)

 

Si qu’y r’viendrait ! Si qu’y r’viendrait,

L’Homm’ Bleu qui marchait su’ la mer

Et qu’était la Foi en balade :

 

Lui qui pour tous les malheureux

Avait putôt sous l’ téton gauche

En façon d’ cœur... un Douloureux.

(Preuv’ qui guérissait les malades

Rien qu’à les voir dans l’ blanc des yeux,

C’ qui rendait les méd’cins furieux.)

 

L’ gas qu’en a fait du joli

Et qui pour les muffs de son temps

N’tait pas toujours des pus polis !

 

Car y disait à ses Apôtres :

— Aimez-vous ben les uns les autres,

Faut tous êt’ copains su’ la Terre,

Faudrait voir à c’ qu’y gn’ait pus d’ guerres

Et voir à n’ pus s’ buter dans l’ nez,

Autrement vous s’rez tous damnés.

 

Et pis encor :

— Malheur aux riches !

Heureux les poilus sans pognon,

Un chameau s’ enfil’rait ben mieux

Par le petit trou d’eune aiguille

Qu’un michet n’entrerait aux cieux !

 

L’ mec qu’était gobé par les femmes

(Au point qu’ c’en était scandaleux),

L’Homme aux beaux yeux, l’Homme aux beaux rêves

Eul’ l’ charpentier toujours en grève,

L’artiss’, le meneur, l’anarcho,

L’entrelardé d’ cambrioleurs

 

(Ça s’rait-y paradoxal ?)

L’ gas qu’a porté su’ sa dorsale

Eune aut’ croix qu’ la Légion d’Honneur !

 

II

 

Si qu’y r’viendrait, si qu’y r’viendrait !

Tout d’un coup... ji... en sans façons,

L’ modèl’ des méniss’s économes,

Lui qui gavait pus d’ cinq mille hommes

N’avec trois pains et sept poissons.

 

Si qu’y r’viendrait juste ed’ not’ temps

Quoi donc qu’y s’ mettrait dans l’ battant ?

Ah ! lui, dont à présent on s’ fout

(Surtout les ceuss qui dis’nt qu’ils l’aiment).

 

P’têt’ ben qu’y n’aurait qu’ du dégoût

Pour c’ qu’a produit son sacrifice,

Et qu’ cette fois-ci en bonn’ justice

L’aurait envie d’ nous fout’ des coups !

 

Si qu’y r’viendrait... si qu’y r’viendrait

Quéqu’ jour comm’ ça sans crier gare,

En douce, en pénars, en mariolle,

De Montsouris à Batignolles,

Nom d’un nom ! Qué coup d’ Trafalgar !

 

Devant cett’ figur’ d’honnête homme

Quoi y diraient nos négociants ?

(Lui qui bûchait su’ les marchands)

Et c’est l’ Pap’ qui s’rait affolé

Si des fois y pass’rait par Rome

 

(Le Pap’, qu’est pus riche que Crésus.)

J’en ai l’ frisson rien qu’ d’y penser.

Si pourtant qu’y r’viendrait Jésus,

 

Lui, et sa gueul’ de Désolé !

 

II

III

 

Eh ben ! moi... hier, j’ l’ai rencontré

Après menuit, au coin d’eun’ rue,

Incognito comm’ les passants

Des tifs d’argent dans sa perrugue

Et pour un Guieu qui s’ paye eun’ fugue

Y n’était pas resplendissant !

 

Y n’est v’nu su’ moi et j’y ai dit :

— Bonsoir... te v’là ? Comment, c’est toi ?

Comme on s’ rencontr’... n’en v’là d’eun’ chance !

Tu m’épat’s... t’es sorti d’ ta Croix ?

Ça n’a pas dû êt’ très facile...

Ben... ça fait rien, va, malgré l’ foid,

Malgré que j’ soye sans domicile,

J’ suis content d’ fair’ ta connaissance

 

— C’est vraiment toi... gn’a pas d’erreur !

Bon sang d’ bon sang... n’en v’là d’eun’ tuile !

Qué chahut d’main dans Paris !

Oh ! là là, qué bouzin d’ voleurs :

Les jornaux vont s’ vend’ par cent mille !

— Eud’mandez : « Le R’tour d’ Jésus-Christ ! »

— Faut voir : « L’Arrivée du Sauveur !!! »

 

— Ho ! tas d’ gouapeurs ! Hé pauv’s morues,

Sentinell’s des miséricordes,

Vous savez pas, vous savez pas ?

(Gn’a d’ quoi se l’esstraire et s’ la morde !)

 

Rappliquez chaud ! Gn’a l’ fils de Dieu

Qui vient d’ déringoler des cieux

Et qui comme aut’fois est sans pieu,

Su’ l’ pavé... quoi... sans feu ni lieu

Comm’ nous les muffs, comm’ vous les grues !!!

 

— (Chut ! fermons ça... v’là les agents !)

T’entends leur pas... intelligent ?

Y s’ charg’raient d’ nous trouver eun’ turne.

(Viens par ici... pet ! crucifié.)

Tu sais... faurait pas nous y fier.

Déjà dans l’ squar’ des Oliviers,

Tu as fait du tapag’ nocturne ;

 

— Aujord’hui... ça s’rait l’ mêm’ tabac,

Autrement dit, la même histoire,

Et je n’ te crois pus l’estomac

De r’subir la scèn’ du Prétoire !

— Viens ! que j’ te r’garde... ah ! comm’ t’es blanc.

Ah ! comm’ t’es pâl’... comm’ t’as l’air triste.

(T’as tout à fait l’air d’un artiste !

D’un d’ ces poireaux qui font des vers

Malgré les conseils les pus sages,

Et qu’ les borgeois guign’nt de travers,

Jusqu’à c’ qu’y fass’nt un rich’ mariage !)

 

— Ah ! comm’ t’es pâle... ah ! comm’ t’es blanc,

Tu guerlott’s, tu dis rien... tu trembles.

(T’ as pas bouffé, sûr... ni dormi !)

Pauv’ vieux, va... si qu’on s’rait amis

Veux-tu qu’on s’assoye su’ un banc,

Ou veux-tu qu’on balade ensemble...

 

— Ah ! comm’ t’ es pâle... ah ! comm’ t’ es blanc,

T’ as toujours ton coup d’ lingue au flanc ?

De quoi... a saign’nt encor tes plaies ?

Et tes mains... tes pauv’s mains trouées

Qui c’est qui les a déclouées ?

Et tes pauv’s pieds nus su’ l’ bitume,

Tes pieds à jour... percés au fer,

Tes pieds crevés font courant d’air,

Et tu vas chopper un bon rhume !

 

— Ah ! comm’ t’ es pâle... ah ! comm’ t’ es blanc,

Sais-tu qu’ t’ as l’air d’un Revenant,

Ou d’un clair de lune en tournée ?

T’ es maigre et t’ es dégingandé,

Tu d’vais êt’ comm’ ça en Judée

Au temps où tu t’ proclamais Roi !

À présent t’ es comme en farine.

Tu dois t’en aller d’ la poitrine

Ou ben... c’est ell’ qui s’en va d’ toi !

 

— Quéqu’ tu viens fair’ ? T’ es pas marteau ?

D’où c’est qu’ t’ es v’nu ? D’en bas, d’en haut ?

Quelle est la rout’ que t’ as suivie ?

C’est-y qu’ tu r’commenc’rais ta Vie ?

Es-tu v’nu sercher du cravail ?

(Ben... t’ as pas d’ vein’, car en c’ moment,

Mon vieux, rien n’ va dans l’ bâtiment) ;

(Pis, tu sauras qu’ su’ nos chantiers

On veut pus voir les étrangers !)

 

— Quoi tu pens’s de not’ Société ?

Des becs de gaz... des électriques.

Ho ! N’en v’là des temps héroïques !

Voyons ? Cause un peu ? Tu dis rien !

T’ es là comme un paquet d’ rancœurs.

T’ es muet ? T’ es bouché, t’ es aveugle ?

Yaou... ! T’ entends pas ce hurlement ?

C’est l’ cri des chiens d’ fer, des r’morqueurs,

C’est l’ cri d’ l’Usine en mal d’enfant,

 

C’est l’ Désespoir présent qui beugle !

 

IV

 

— Ed’ ton temps, c’était comme aujord’hui ?

Quand un gas tombait dans la pure

Est-c’ qu’on l’ laissait crever la nuit

Sans pèz’, sans rif et sans toiture ?

 

— (Pass’ que maint’nant gn’a du progrès,

Ainsi quand gn’a trop d’ vagabonds

Ben on les transmet au Gabon.)

Ceux d’ bon gré et ceux d’ mauvais gré

Et ceuss comm’ toi qu’ont la manie

D’ trouver que l’ monde est routinier,

Ben on les fout dans l’ mêm’ pagnier.

(Dam ! le Français est casanier,

Faut ben meubler les colonies !)

 

— On parle encor de toi, tu sais !

Voui on en parle en abondance,

On s’ fait ta tête et on s’ la paie,

T’ es à la roue... t’ es au théâtre,

On t’ met en vers et en musique,

T’ es d’venu un objet d’ Guignol,

(Ça, ça veut dir’ qu’ tu as la guigne.)

 

— Ousqu’il est ton ami Lazare ?

Et Simon Pierre ? Et tes copains...

Et Judas qui bouffait ton pain

Tout en t’ vendant comme au bazar ?

Et tes frangins et ta daronne

Et ton dab, qu’était ben jean-jean !

 

Te v’là, t’es seul ! On t’abandonne !

 

— Et Mad’leine... ousqu’alle est passée ?

(Ah ! pauv’ Mad’leine... pauv’ défleurie,

Elle et ses beaux nénés tremblants,

Criant pitié, miaulant misère,

Ses pauv’s tétons en pomm’s d’amour

Qu’ étaient aussi deux poir’s d’angoisse

Qu’on s’ s’rait ben foutu dans l’ clapet.)

 

— C’était la paix, c’était la Vie.

Ah ! tout fout l’ camp et vrai, ma foi,

T’ aurais mieux fait d’ te mett’ en croix

Contr’ son ventr’ nu... contr’ sa poitrine,

Ces dardés-là t’euss’nt pas blessé,

Sûr t’aurais mieux fait... d’ l’embrasser :

A n’avait un pépin pour toi !

 

V

 

Ah ! Généreux !... ah ! Bien-aimé,

Tout ton monde y s’a défilé

Et comm’ jadis, au Golgotha :

Eli lamma Sabacthani,

Ou n, i, ni c’est ben fini.

 

Eh ! blanc youpin... eh ! pauv’ raté !

Tout ton Œuvre il a avorté

Toi, ton Étoile et ta Colombe

Déringol’nt dans l’éternité ;

Tu dois en avoir d’ l’amertume.

Même à présent quand la neig’ tombe :

 

(On croirait tes Ang’s qui s’ déplument !)

 

Là, là, mon pauv’ vieux, qué désastre !

Gn’en a pas d’ pareil sous les astres,

Et faut qu’ ça soye moi qui voye ça ?

Et dir’ que nous v’là toi z’et moi,

Des bouff-la-guign’, des citoyens

Qu’ ont pas l’ moyen d’avoir d’ moyens.

 

Et que j’ suis là, moi, bon couillon,

À t’ causer... à t’ fair’ du chagrin,

Et que j’ sens qu’ tu vas défaillir

Et que j’ai mêm’ rien à t’offrir,

Pas un verre... un bol de bouillon !

 

Ohé, les beaux messieurs et dames

Qui poireautez dans les Mad’leines,

Curés, évêques, sacristains,

Maçons, protestants, tout’ la clique,

Maqu’reaux d’ vot’ Dieu, hé ! catholiques,

Envoyez-nous un bout d’hostie :

 

G’na Jésus-Christ qui meurt de faim !

 

VI

 

— Et pourtant, vrai, c’ qu’on caus’ de toi !

(Ah ! faut voir ça dans les églises,

Dans les jornaux, dans les bouquins !)

Tout l’ monde y bouff’ de ton cadavre

(Mêm’ les ceuss qui t’en veul’nt le plus !)

 

Sous la meilleur’ des Républiques

Gn’en a qu’ ont voulu t’ décrocher,

D’aut’s inaugur’nt des basiliques

Où tu peux seul’ment pas coucher.

 

— Et tout ça s’ passe en du clabaud !

Et quand y faut payer d’ sa peau,

Quand faut imiter l’ Fils de l’Homme,

Oh ! là, là, gn’a rien d’ fait... des pommes !

 

Les sentiments sont vit’ bouclés,

À la r’voyure, un tour de clé !

Les uns y z’ont les pieds nick’lés,

Les aut’s y les ont en dentelles !

 

— (Toi au moins t’ étais un sincère,

Tu marchais... tu marchais toujours ;

(Ah ! cœur amoureux, cœur amer)

Tu marchais mêm’ dessur la mer

Et t’ as marché... jusqu’au Calvaire !)

 

— Et dir’ que nous v’là dans les rues

(Moi, passe encor, mais toi ! oh ! toi !)

Et nous somm’s pas si loin d’ Noël ;

T’es presque à poils comme autrefois,

Tout près du jour où ta venue

Troublait les luisants et les Rois !

 

Ah ! mes souv’nirs... ah ! mon enfance

(Qui s’est putôt mal terminée),

Mes ribouis dans la cheminée,

Mes mirlitons... mes joujoux d’ bois !

 

— Ah ! mes prièr’s... ah ! mes croyances !

— Mais ! gn’a donc pus rien dans le ciel !

 

—  Sûr ! gn’a pus rien ! Quelle infortune !

(J’ suis mêm’ pas sûr qu’y ait cor la Lune.)

Sûr ! gn’a pus rien, mêm’ que peut-être

Y gn’a jamais, jamais rien eu...

 

VII

 

Mais à présent... quoi qu’ tu vas foutre ?

Fair’ des bagots... ou ben encor

Aux Hall’s... décharger les primeurs !

(N’ va pas chez Drumont on t’ bouff’rait)

Après tout, tu n’étais qu’un youtre !

 

— Si j’ te servais tes Paraboles !

 

Heureux les Simpl’s, heureux les Pauvres,

Eul’ Royaum’ des Cieux est à euss.

 

— (C’est avec ça qu’on nous empaume,

Qu’on s’ cal’ des briqu’s et des moellons)

Ben, tu sais, j’ m’en fous d’ ton Royaume ;

J’am’rais ben mieux des patalons

Eun’ soupe, eun’ niche et d’ l’amitié.

 

(Car quoiqu’ t’ ay’ ben fait ton métier

Toi, ton grand cœur et ta pitié,

N’empêch’nt pas d’avoir foid aux pieds !)

 

— Ainsi arr’gard’ les masons closes

Où roupill’nt ceuss’ qui croient en Toi.

Sûr qu’ t’es là, su’ des bénitiers

Dans les piaul’s... à la têt’ des pieux ;

Crois-tu qu’un seul de ces genss’ pieux

Vourait t’abriter sous son toit ?

 

VIII

 

Ah ! toi qu’on dit l’Emp’reur des Pauvres

Ben ton règne il est arrivé.

Tu d’vais r’venir, tu l’as promis,

Assis su’ ton trône et « plein d’ gloire »

Avec les Justes à ta droite ;

Et te v’là seul dans la nuit noire

Comm’ un diab’ qu’est sorti d’ sa boîte !

Sais-tu seul’ment où est ta gauche ?

 

Oh ! voui t’es là d’pis deux mille ans

Su’ un bout d’ bois t’ouvr’ tes bras blancs

Comme un oiseau qu’ écart’ les ailes,

Tes bras ouverts ouvrent... le ciel

Mais bouch’nt l’espoir de mieux bouffer

Aux gas qui n’ croient pus qu’à la Terre.

 

Oh ! oui t’es là, t’ouvr’ tes bras blancs

Et vrai d’pis Y temps qu’on t’a figé

C’ que t’en as vu des affligés,

Des fous, des sag’s ou des d’moiselles

Combien d’ mains s’ sont tendues vers toi

Sans qu’ t’aye pipé, sans qu’ t’aye bronché !

 

Avoue-le va... t’ es impuissant,

Tu clos tes châss’s, t’ as pas d’ scrupules,

Tu protèg’s avec l’ mêm’ sang-froid

L’ sommeil des Bons et des Crapules.

Et quand on perd quéqu’un qu’on aime,

Tu décor’s, mais tu consol’s pas.

 

Ah ! rien n’ t’émeut, va, ouvr’ les bras,

Prends ton essor et n’ reviens pas ;

T’ es l’Étendard des sans-courage,

T’ es l’Albatros du Grand Naufrage,

T’ es le Goëland du Malheur !

 

IX

 

Quiens ! ôt’-toi d’ là et prends ta course,

Débin’, cavale ou tu vas voir,

 

Aussi vrai qu’ j’ai un nom d’ baptême

Et qu’ nous v’là tous deux dans la boue,

Aussi vrai que j’ suis qu’eun’ vadrouille,

Un bat-la-crève, un fout-la-faim

Et toi un Guieu magasin d’ giffes.

 

Ej’ m’en vas t’ buter dans la tronche,

J’ vas t’ boulotter la pomm’ d’Adam,

J’ m’en vas t’ rincer, gare à ta peau !

 

En v’là assez... j’ m’en vas t’ saigner.

J’ai soupé, moi, des Résignés

J’ai mon blot des Idéalisses !

 

— Arrière, arrièr’, n’ va pas pus loin !

Un moment vient où tout s’ fait vieux,

Où les pus bell’s chos’s perd’nt leurs charmes :

 

(Oh ! v’là qu’ tu pleur’s, et des vraies larmes !

Tout va s’écrouler, nom de Dieu !)

 

— Ah ! je m’ gondole... ah ! je m’ dandine...

Rien n’ s’écroule, y aura pas d’ débâcle ;

Eh l’Homme à la puissance divine !

Eh ! fils de Dieu ! fais un miracle !

 

X

 

— Et Jésus-Christ s’en est allé

Sans un mot qui pût m’ consoler,

Avec eun’ gueul’ si retournée

Et des mirett’s si désolées

Que j’ m’en souviendrai tout’ ma vie.

 

Et à c’ moment-là, le jour vint

Et j’ m’aperçus que l’Homm’ Divin..

C’était moi, que j’ m’étais collé

D’vant l’ miroitant d’un marchand d’ vins !

 

On perd son temps à s’engueuler...

 

III

Il suffit d’un Homme pour

changer la face du monde.

J. R.

 

XI

 

Mais ça fait rien si qu’y r’viendrait

Quéqu’ nuit d’Hiver quand l’ frio semble

Fair’ péter pavés et carreaux

(Mais durcir les cœurs les pus tendres),

Et g’ler les pleurs aux cils qui tremblent,

Si qu’y planquait son blanc mensonge

Quéqu’ nuit autour d’un brasero !

 

Ça s’rait p’têt’ moi qui yi dirait

Les mots qui s’raient l’ pus nécessaire

Et ça s’rait p’têt’ ben moi qui s’rait

L’ pus au courant d’ sa grand’ misère,

Ça s’rait p’ têt’ moi qui l’ consol’rais...

 

— Ah ! qu’ j’y crierais, n’ va pas pus loin,

A branl’nt dans l’ manch’ tes cathédrales ;

N’ va pas pus loin, n’ va pas pus loin,

Ton pat’lin bleu est cor pus vide

Qu’ nos péritoin’s réunis.

Ah ! enfonc’-toi les poings dans l’ bide

Jusqu’à la colonn’ vertébrale !

 

— Arrière, arrièr’, n’ va pas pus loin !

Ou n’ viens qu’ la s’main’ des quat’-jeudis

Car tu r’trouv’rais tes Ponce-Pilate

Présent en limace écarlate,

Trempée dans l’ sang des raccourcis !

 

— Arrière, arrièr’, n’ va pas pus loin !

(Car l’Iscariot a fait des p’tits)

Tu pourrais pus confier ta peine

Qu’aux grands torchons ou... à la Seine.

 

T’ as cru à l’Homm’ toi, ma pauv’ vieille ?

Ah ben ! tu sais, moi je n’ sais pus !

{Ventre affamé n’a pas d’oreilles

Et les vent’s pleins n’en ont pas plus !)

 

XII

 

— Pleur’ ! Pleure encor, pleur’ tout’s tes r’ssources

(Comm’ pleur’ le gas qui n’ peut payer

Son enterr’ment ou son loyer).

Qu’ tes trous à voir d’vienn’nt deux gross’s sources

Et qu’ l’Univers en soye noyé !

 

— Pleur’ ! pleure encore et sois béni,

Ta banq’ d’amour a fait faillite

Coffret d’ sanglots, boîte à génie.

 

Ah ! le beau rêv’ que t’ as conté.

Ton Paradis ? La belle histoire

Sans c’te vach’ de Réalité :

 

— T’ étais l’ pus pauv’ d’entre les Hommes

Car tu sentais qu’ tu pouvais rien

Contre leur débine indurée :

 

(Or comm’ les Pauv’s n’ont d’aut’ moyen

Pour bouffer un peu leur chagrin

Que d’ se réciter leur détresse

Ou d’en dir’ du mal à part eux

Et rêvasser quéqu’ chose de mieux

Pour le surlend’main des lend’mains)

 

— Toi, t’ as voulu sécher d’un coup

Le très vieux cancer des Humains

Et pour ça leur en faire accroire...

Ton Paradis ? la belle histoire !

Et tu leur aimantas les yeux

Vers le vide enivrant des cieux

Qui dans ton pat’lin sont si bleus !

 

(Ton Paradis ? Eh ben ! c’était

Un soliloque de malheureux !)

 

XIII

 

— Ah ! sors-toi l’ cœur, va, pauv’ panné,

Ton cœur de pâle illuminé,

Au lieur d’histoir’s à la guimauve

Hurle ta peine à plein gosier.

 

— Pisqu’y gn’a pus personn’ qui t’aime

Et qu’ te v’là comme abandonné

Le cul su’ ta Mason ruinée,

Sors-moi ton cœur désordonné

Lui qui n’a su que pardonner,

Tremp’-le dans la boue et dans l’ sang

Et dans ton poing qu’y d’vienne eun’ fronde

Et fous-le su’ la gueule au monde

Y t’en s’ra p’têt’ reconnaissant !

 

(T’ en as déjà donné l’exemple

Mais d’puis... l’a passé d’ l’eau sous l’ pont)

Faut rester l’ gas au coup d’ tampon

Qui boxait les marchands du Temple !

 

— Chacun a la Justice en lui,

Chacun a la Beauté en lui,

Chacun a la Force en lui-même,

L’Homme est tout seul dans l’Univers,

Oh ! oui, ben seul et c’est sa gloire,

 

Car y n’a qu’ deux yeux pour tout voir.

 

Le Ciel, la Terre et les Étoiles

Sont prisonniers d’ ses cils en pleurs.

Y n’ peut donc compter qu’ su’ lui-même.

J’ m’en vas m’ remuer, qu’ chacun m’imite,

C’est là qu’est la clef du Problème,

L’Homm’ doit êt’ son Maître et son Dieu !

 

XIV

 

— Quiens ! V’là l’ Souriant en flanquet bleu,

V’là l’ coq qui crach’ son vieux catarrhe

Comme au matin d’ ton agonie

Alors que Pierr’ copiait Judas

 

(Tu vois c’te bête alle a s’en fout

A sonn’ la diane de la Vie,

La Vie qui n’ meurt pas comm’ les Dieux !)

 

— Viens çà un peu que j’ te délie

Et que j’ t’aide à sortir tes clous

(Eustach’s pour qui qui nous touch’ra)

 

Viens avec moi par les Faubourgs,

Par les mines, par les usines

On ballad’ra su’ les Patries

Où tes frangins sont cor à g’noux

(Car c’est toi qui les y a mis !)

 

Faut à présent leur prend’ les pattes,

Les aider à se r’mett’ debout,

Y faut secouer au cœur des Hommes

Le Dieu qui pionc’ dans chacun d’ nous !

 

XV

 

Ou ben alorss si tu peux pas,

Si tu n’as pus rien dans les moëlles,

[Retourn’ chez l’Accrocheur d’Étoiles]

Remont’ là-haut ! Va dire au Père,

À celui qui t’a envoyé,

Quéqu’ chos’ qu’aurait l’air d’eun’ prière

Qui s’rait d’ not’ temps, eh ! crucifié.

 

XVI

 

Notre dab qu’on dit aux cieux,

 

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

 

Notre daron qui êt’s si loin

Si aveug’, si sourd et si vieux,

 

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

 

Que Notre effort soit sanctifié,

Que Notre Règne arrive

 

À Nous les Pauvr’s d’pis si longtemps,

 

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

 

Su’ la Terre où nous souffrons

Où l’on nous a crucifiés

Ben pus longtemps que vot’ pauv’ fieu

Qu’a d’jà voulu nous dessaler.

 

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

 

Que Notre volonté soit faite

Car on vourait le Monde en fête,

D’ la vraie Justice et d’ la Bonté,

 

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

 

Donnez-nous tous les jours l’ brich’ton régulier

(Autrement nous tâch’rons d’ le prendre) ;

Fait’s qu’un gas qui meurt de misère

Soye pus qu’un cas très singulier.

 

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

 

Donnez-nous l’ poil et la fierté

Et l’estomac de nous défendre,

 

(Des fois qu’on pourrait pas s’entendre !)

 

Pardonnez-nous les offenses

Que l’on nous fait et qu’on laiss’ faire

Et ne nous laissez pas succomber à la tentation

De nous endormir dans la misère

Et délivrez-nous de la douleur

(Ainsi soit-il !)

 

*

 

Cette page s'inscrit dans les siècles des siècles. On pourra lire en regard ce qui est de maintenant : Le thérondelle_18 – From Russia with Love, Le thérondelle_19 – вокру́г самовара (à paraître ce dimanche 17 février).

 

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11 février 2013 1 11 /02 /février /2013 00:01

 

Daniel Humair, Sweet & Sour

Daniel Humair, Parisien, Regard, Peirani, Sweet & Sour, 2012

 

Daniel Humair

Daniel Humair, batteur, compositeur, peintre

 

Daniel Humair, Peirani, Regard, Parisien, Ground Zero, Sweet & Sour

 

 

Daniel Humair, 2012

 

« Ma peinture, dit-il, c'est une peinture spontanée faite d'improvisations et de hasards contrôlés »

 

Signes, vibrations, rythmes, jazz et peinture.

 

« Avec cette nouvelle réunion, "Sweet & Sour", j'ai souhaité insister sur l'aspect spontané de nos propositions musicales. Pour cela, il est bien entendu que chaque musicien fonctionne tout à fait librement mais reste toujours à l'écoute du collectif dans le but de faire sonner les parties thématiques imposées, mais également afin d'engendrer de nouvelles directions quant à l'improvisation collective.

[…]

Je dois quand même souligner notre approche vers un tempo irrégulier fluctuant, sans mesure définie, avec quelquefois plusieurs options différentes superposées, des introductions faites de peu d'éléments qui s'affirment, se développent et s'imposent au cours de la composition collective mélangeant quelquefois l'aigre et le doux, le calme et le chaos, création toujours pulsée, même si celle-ci est quelquefois insolite, peu "métronomique", de durée et d'intensité variables, quasiment jamais dansantes. »

 

Daniel Humair est en résistance, avec le saxophoniste Emile Parisien, le contrebassiste Jérôme Regard et l'accordéoniste Vincent Peirani, des éléments subversifs comme ils les aime, en jouissance et humour.

 

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5 février 2013 2 05 /02 /février /2013 00:01

 

Scène 1

Dans un salon de thérondelle

 

_ ...

_ A quoi songes-tu, ma chérie ?

_ A ma jeunesse... ma chambrette mansardée, rue de la Huchette, où Charles-Edouard me raccompagnait après les cours rue d'Assas...

_ Tu as fait la fac de droit ?

_ La première année seulement... c'est là que j'ai rencontré l'homme de ma vie.

_ Ah ?

_ Assas est le seul site de rencontres pour jeunes filles exigeantes. Il m'invitait chez le Libanais du coin, mezzé, ailerons de poulet marinés, café avec le marc...

_ ... ?

_ … de café ! Puis nous allions voir La Cantatrice chauve...

_ ... de Beckett ?

_ … de Ionesco ! Nous allions danser au Caveau avec Claude Bolling... jusqu'à l'aube... il me faisait livrer des brassées de lilas blanc...

_ ... en hiver ?

_ ... son père avait une serre, quelque part.

_ Moi, j'ai fait STT, Secrétariat, Paul-Hervé était en ES. A Pâques, il m'a emmenée au Wimpy, et nous sommes allés rue des Écoles où on repassait un Jerry Lewis, Prends l'oseille et tire-toi.

_ La devise de Charles-Edouard ! Dans quinze jours, ma cocotte, Le Bourget-Cheremetievo, nous prenons notre jet privé.


Vatrouchka

 

_ Mesdames, aujourd'hui, nous avons le Vatrouchka, c'est très tendance, avec le samovar.

_ хорошо ! Быстро !

_ Pour moi, un Colonel-Fabien, avec... le Kil Krasucki.

_ ...

_ Charles-Edouard a nos passeports...

_ ... ah ?

_ Par Gégé ! Nous avons revendu Passy pour une chambre de poupée...

_ ... russe ?

_ ... de 1200 m2, près du Goum, ça va shopper !

_ Et ta jeunesse ?

_ Quand les Rouges venaient lancer leurs tracts à la sortie de la fac, on leur chantait : Les cocos à Moscou ! Il n'y a plus de cocos, et ça fait un bail.

_ Pour le bail, tu sais, un des locataires sociaux de Paul-Hervé n'a pas payé son loyer, et on ne peut pas l'expulser parce que c'est l'hiver et qu'il a trois enfants en bas âge, Ahmed, 18 mois, Mouloud, 16 mois, Rachid, 12 mois.

_ Comment fait la mère ?

_ Il en a trois, rapport à la religion.

_ Comme le dit Charles-Edouard...

_ ... il va se convertir ?

_ T'es folle ! Il est fou de moi.

_ ...

_ Tu ne finis pas ton Kil ?

 

Scène 2

Dans la rue, un coco déchu

 

_ Mesdames, je n'ai plus rien, ils m'ont tout pris.

_ Il vous reste votre liberté de penser !

 

* * *

 

Le thérondelle

http://www.libellus-libellus.fr/article-29729004.html

 

Le thérondelle 02

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_02-a-va-casser-50786154.html

 

Le thérondelle 03

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_03-a-casse-de-partout-66024478.html

 

Le thérondelle 04

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_04-la-crise-n-est-pas-une-fatalite-66681861.html

 

Le thérondelle 05

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_05-banderille-ou-banderole-a-chie-de-partout-67717438.html

 

Le thérondelle 06

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_06-rondelle-ou-nuage-69437987.html

 

Le thérondelle 07

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_07-moi-j-aime-le-music-hall-et-charles-trenet-fukushima-03-70005841.html

 

Le thérondelle 08

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_08-la-dame-au-camelia-71042830.html

 

Le thérondelle 09

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_09-colchiques-dans-les-pres-73592474.html

 

Le thérondelle 10

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_10-un-cauchemar-74204346.html

 

Le thérondelle 11

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_11-des-idees-pres-de-chez-vous-75035415.html

 

Le thérondelle 12

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_12-fromages-78050510.html

 

Le thérondelle 13

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_13-voila-justement-ce-qui-fait-que-votre-fille-est-muette-103708088.html

 

Le thérondelle 14

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_14-le-macaron-111360683.html

 

Le thérondelle 15

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Le thérondelle 16

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Le thérondelle 17

http://www.libellus-libellus.fr/article-le-therondelle_17-chez-mimile-113481887.html

 

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31 janvier 2013 4 31 /01 /janvier /2013 00:01

 

Patricia Parry, Sur un lit de fleurs blanches

Patricia Parry, Sur un lit de fleurs blanches, Éditions du Masque, 2012

 

Des enfants sont retrouvés morts dans des cimetières parisiens. Ils sont exsangues. On les a disposés sur un lit de lilas blanc, un rituel.

L'aventure est contée du point de vue de deux personnages, Clara Saint-James, une demi-mondaine de haut vol, et Victor Dupuy, jeune médecin en quête de clientèle.

Victor Dupuy souffre depuis son enfance d'une allergie au lilas qui lui donne des crises de suffocation, de l'asthme.

Clara s'est trouvée peu de temps auparavant presque vidée de son sang après une fausse couche.

Victor est un peu nègre de peau. Son arrière-grand-père, Aurèle Dupuy d'Amans, était planteur à la Martinique, son fils, né d'une martiniquaise, était son esclave, il l'a affranchi. Le grand-père a connu une femme blanche. Leur fille s'est unie à Hugues de La Paillerie, le vieil amant récemment disparu de Clara. Victor est un octoron : dans ses veines coule un huitième de sang noir et du sang bleu.

 

Patricia Parry

Elle est charmante. Patricia Parry, de son nom de plume, est née d’une mère narbonnaise et d’un père africain.

 

Le Journal de France, que les initiés appellent simplement Le Journal, publie des relations de faits divers et un roman-feuilleton, La Ligue des notaires, signé par un certain Paul Lachesnaye et rédigé par des nègres à son service.

Le 24 mars 1885, les enfants sacrifiés et le feuilleton se rejoignent sur la première page.

 

Les voix sont retranscrites en une typographie spécifique à chacune d'entre elles, ce qui permet une reconnaissance immédiate du point de vue – une mise en page remarquable.

 

Pierre Drachline, Le Fait Divers

 

Au XIXe siècle, le fait divers, pour le bonheur des dames et de la presse, masque la réalité sociale.

Comme on payait un franc aux femmes pour une journée de douze heures, et deux à trois francs aux hommes, s'ils étaient qualifiés, les cent sous de Nono étaient donc bien un pactole. On comptait trente-cinq centimes pour un kilo de pain.

 

De nos jours...

 

La galerie de personnages présentée par Patricia Parry s'expose dans la tradition d'Alexandre Dumas, de Ponson du Terrail, des feuilletonistes.

La Saint-James, Victor Dupuy, Norbert dit Nono et Jules, son frère, Julot, gamins des rues, Jeanjean, à l'entrée du café Tortoni où l'on trouve Solveg, un peu médecin, un peu juriste, un peu journaliste, Paul Lachesnaye, le feuilletoniste épuisé par la syphilis et qui n'écrit plus, Etienne Bussy, vieil ami et confrère de Victor, mettant la main à la plume que Lachesnaye ne peut plus tenir, Séverin Flocher, le sergent de ville qui voudrait être Dumas, le critique des théâtres qui fait et se fait les Folies-Bergère...

 

Émile, la boulange, apprenti chez Lainard, comme Jules, comme Augustin, l'un des enfants retrouvés dans les cimetières, le professeur Chevaignac, à la recherche du sang sauveur, la cure miraculeuse, François, son assistant invisible, Hugues de la Paillerie, René, son fils, il a besoin de sang, Diane de Volanges, comme la Cécile de Choderlos de Laclos, tenancière d'un bouic fort débridé, Joséphine et Céleste, servantes dévouées, sœur Marie-Thomas, consacrée auprès des enfants, un ministre de l'Intérieur... Toute ressemblance...

 

Le Journal de France, 24 mars 1885

Macabre découverte

au cimetière du Montparnasse

Nous venons d'apprendre qu'il y a dix semaines le corps d'un apprenti boulanger de douze ans, Augustin Françoise, avait été retrouvé par un père de famille en visite au cimetière du Montparnasse. L'enfant était saigné à blanc, allongé sur une tombe. Il ne s'agirait pas du premier meurtre de ce type commis récemment dans notre capitale. De source sûre, depuis trois mois, au moins quatre garçons entre dix et quatorze ans ont été victimes de celui qu'entre eux ces enfants appellent le « Saigneur »...

 

La Ligue des notaires, feuilleton-roman

de M. Paul Lachesnaye. Épisode 10

Lord Willex se tenait devant sa victime, une longue et fine dague entre les mains.

Les Notaires s'étaient massés autour de lui, formant un cercle. On n'aurait pas été surpris de les entendre invoquer quelque cruelle divinité inconnue. Jamais ils n'avaient mieux porté leur nom qu'en cette froide soirée de décembre.

[…]

Devant le mausolée de la famille Vasconcellos de Almeida, un jeune garçon était étendu sur une large pierre en forme d'autel. Le sacrifice allait commencer...

 

Pourquoi les enfants des cimetières ont-ils été saignés à blanc au cours d'un spectacle rituel ?

Quelquefois, pour que la magie ou l'effet Charcot opère, il faut un sacrifice...

 

Qui est le « Saigneur » ?

 

Une intrigue policière peut être représentée en une grille de deux lignes et x colonnes.

 

Personnages :

- Majordome

- Pierre

- Paule

- Jacques

 

Fonctions :

- jeune héritier

- maîtresse éconduite

- mari jaloux

- coupable

 

La fonction coupable n'est pas attribuée et l'un des personnages n'a pas de fonction dans l'intrigue : le coupable est le majordome.

Ce schéma est subverti quand les personnages ne sont pas ce qu'ils paraissent du fait de travestissements.

Patricia Parry connaît les trames obscures du Malin.

 

 

Le Journal de France, 20 mai 1885

La Ligue des notaires, feuilleton-roman,

par M. Paul Lachesnaye. Épisode 58

_ Ah, ah, dit Dom Manoel en portugais...

 

Le journal de France espère avoir le privilège d'offrir à ses lecteurs un prochain feuilleton-roman...

 

* * *

 

Des transfusions sanguines ont été pratiquées bien avant le XIXe siècle : le pape Innocent VIII en est mort. La plus ancienne transfusion attestée comme réussie fut pratiquée par Jean Baptiste Denis, le 15 juin 1667, sur Louis XIV.

Les groupes sanguins n'ont été découverts qu'au XXe siècle et ont induit des victimes, du fait de l'ignorance du facteur Rhésus, découvert par Karl Landsteiner et Alexander Salomon Wiener en 1940, et pressenti en 1939 par P. Levine et R.E. Stetson.

Le groupe O- (le plus favorable à la cure miraculeuse, inconnu en 1885) est considéré comme le plus ancien (- 30.000 ans), il est très répandu en Afrique.

Les guerres ont toujours profité à la recherche, Patricia Parry le rappelle, par la voix d'un de ses acteurs.

Toute ressemblance...

 

* * *

 

Remerciements à Yueyin pour sa page que tu lis là : - )

 

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27 janvier 2013 7 27 /01 /janvier /2013 00:01

 

Samuel Beckett, Comment c'est

Samuel Beckett, Comment c'est, Les Éditions de Minuit, 1961

 

Comment c'est est un roman de Samuel Beckett, publié en français en 1961 et en anglais en 1964. Après Molloy, Malone meurt et L'Innommable, Comment c'est poursuit une quête du premier ou de l'ultime murmure.

 

comment c'était je cite avant Pim avec Pim après Pim comment c'est trois parties je le dis comme je l'entends

 

voix d'abord dehors quaqua de toutes parts puis en moi quand ça cesse de haleter raconte-moi encore finis de me raconter invocation

 

instants passés vieux songes qui reviennent ou frais comme ceux qui passent ou chose chose toujours et souvenirs je les dis comme je les entends les murmure dans la boue

 

en moi qui furent dehors quand ça cesse de haleter bribes d'une voix ancienne en moi pas la mienne

 

ma vie dernier état mal dite mal entendue mal retrouvée mal murmurée dans la boue brefs mouvements du bas du visage pertes partout

 

Samuel Beckett, Comment c'est, dernières pages lues par Michel Bouquet, Anthologie vivante, France 3, 3 avril 1963

 

Un personnage dont on ne connaîtra ni le nom ni le portrait rampe dans la boue, le noir, le silence, traînant un sac pour les boîtes, l'ouvre-boîte, en nous racontant des bribes de sa vie entièrement déterminée par sa rencontre de Pim, autre personnage sans visage. Malgré l'imagination mathématique du conteur jonglant avec les chiffres, le lecteur découvre peu à peu que tout le récit est un leurre : il n'y a pas de Pim, pas d'avant ni de pendant ni d'après. Le conteur est seul responsable de sa vie. Seul à la recherche d'un rêve.

 

L'écriture, savante, a demandé dix-huit mois à Samuel Beckett. Bribes enchevêtrées en une même phrase, sans ponctuation, sur un rythme prenant comme celui de Joyce dans Anna Livia Plurabelle, traduit en français par Beckett, en 1962.

 

* * *

 

Des pas, Fermeture dominicale, 8 décembre 2002 Beckett

 

des pas perdus est gâté par ces temps !

 

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25 janvier 2013 5 25 /01 /janvier /2013 00:01

 

 

Alfred Jarry Véritable Portrait de Monsieur Ubu

Alfred Jarry, Véritable Portrait de Monsieur Ubu

 

Monsieur Ubu est bien connu de nos fidèles. 

♪♫♪En temps de crise, Monsieur Ubu, c'est vraiment la dernière chance au dernier moment. Les mauvais coups des truands, Ubu les règle au comptant. Si l'injustice vous attend, Monsieur Ubu l'attend au tournant : pour la victime aux abois, tout à coup il surgira. Dans les dangers, ce roi du sang-froid, ce voyageur sans visa a livré le bon combat ♪♫♪

 

Son programme révolutionnaire tient en trois points.

 

Abolition des privilèges

 

[Père Ubu] Apportez la caisse à Nobles et le crochet à Nobles et le couteau à Nobles et le bouquin à Nobles ! ensuite, faites avancer les Nobles.

[...]

[Père Ubu] J’ai l’honneur de vous annoncer que pour enrichir le royaume je vais faire périr tous les Nobles et prendre leurs biens.

[...]

[Père Ubu] Amenez le premier Noble et passez-moi le crochet à Nobles. Ceux qui seront condamnés à mort, je les passerai dans la trappe, ils tomberont dans les sous-sols du Pince-Porc et de la Chambre-à-Sous, où on les décervellera.

[...]

[Père Ubu] Allez, passez les Nobles dans la trappe. (On empile les Nobles dans la trappe) Dépêchez-vous plus vite, je veux faire des lois maintenant.

[...]

[Père Ubu] Je vais d’abord réformer la justice, après quoi nous procéderons aux finances.

 

Justice

 

[Plusieurs Magistrats] Nous nous opposons à tout changement.

[Père Ubu] Merdre. D’abord les magistrats ne seront plus payés.

[...]

[Père Ubu] À la trappe les magistrats !

[Mère Ubu] Eh ! que fais-tu, Père Ubu ? Qui rendra maintenant la justice ?

[Père Ubu] Tiens ! moi. Tu verras comme ça marchera bien.

 

Finances

 

[Père Ubu] Nous allons maintenant, messieurs, procéder aux finances.

[...]

[Père Ubu] Messieurs, nous établirons un impôt de dix pour cent sur la propriété, un autre sur le commerce et l’industrie, et un troisième sur les mariages et un quatrième sur les décès, de quinze francs chacun.

[…]

[Père Ubu] Dans la trappe les financiers !

[…]

[Père Ubu] Eh merdre !

[Mère Ubu] Plus de justice, plus de finances.

[Père Ubu] Ne crains rien, ma douce enfant, j’irai moi-même de village en village recueillir les impôts.

 

Béni soit Monsieur Ubu qui visite et rachète son peuple. Il a fait surgir la force qui nous sauve dans la maison de Despas , son serviteur, comme il l'avait dit par la bouche des élus, par ses prophètes, depuis les temps anciens – salut qui nous arrache à l'ennemi, à la main de tous nos oppresseurs, amour qu'il montre envers nos pères, mémoire de son alliance sacrée, serment juré à notre père Ibrahim de lutter sans crainte, afin que délivrés de la main des ennemis nous le servions, dans la justice et la charité, en sa présence, tout au long de nos jours.

 

 

Alfred Jarry, Charles Pourny, Claude Terasse, Chanson du décervelage, Chœur et Orchestre du Collège de 'Pataphysique, 1951

 

La CHANSON DU DéCERVELAGE

Je fus pendant longtemps ouvrier ébéniste,
Dans la ru’ du Champ d’ Mars, d’ la paroiss’ de Toussaints,
Mon épouse exerçait la profession d’ modiste
Et nous n’avions jamais manqué de rien.

Quand le dimanche s’annonçait sans nuage
Nous exhibions nos beaux accoutrements
Et nous allions voir le décervelage
Ru’ d’ l’Echaudé, passer un bon moment.

Voyez, voyez la machin’ tourner,
Voyez, voyez la cervelle sauter,
Voyez, voyez les Rentiers trembler :
(Chœur) : Hourra ! Cornes au cul, vive le Père Ubu !

Nos deux marmots chéris, barbouillés d’ confitures,
Brandissant avec joi’ des poupins en papier,
Avec nous s’installaient sur le haut d’ la voiture
Et nous roulions gaîment vers l’Echaudé.

On s’ précipite en foule à la barrière,
On s’ fich’ des coups pour être au premier rang ;
Moi je m’ mettais toujours sur un tas d’ pierres
Pour pas salir mes godillots dans l’ sang.

Voyez, voyez la machin’ tourner,
Voyez, voyez la cervelle sauter,
Voyez, voyez les Rentiers trembler ;
(Chœur) : Hourra, cornes-au-cul, vive le Père Ubu !

Bientôt ma femme et moi nous somm’s tout blancs d’ cervelle,
Les marmots en boulottent et tous nous trépignons
En voyant l’ Palotin qui brandit sa lumelle,
Et les blessur’s et les numéros d’ plomb.

Soudain j’ perçois dans l’ coin, près d’ la machine,
La gueul’ d’un bonz’ qui n’ m’ revient qu’à moitié.
Mon vieux, que j’ dis, je reconnais ta bobine,
Tu m’as volé, c’est pas moi qui t’ plaindrai.

Voyez, voyez la machin’ tourner,
Voyez, voyez la cervelle sauter,
Voyez, voyez les Rentiers trembler ;
(Chœur) : Hourra, cornes-au-cul, vive le Père Ubu !

Soudain j’ m' sens tirer la manch’ par mon épouse :
Espèc’ d’andouill’, qu’ell’ m’dit, v’là l’moment d’te montrer :
Flanque-lui par la gueule un bon gros paquet d’ bouse,
V’là l’ Palotin qu’a just’ le dos tourné.

En entendant ce raisonn’ ment superbe,
J’attrap’ sus l’ coup mon courage à deux mains :
J’ flanque au Rentier une gigantesque merdre
Qui s’aplatit sur l’ nez du Palotin.

Voyez, voyez la machin’ tourner,
Voyez, voyez la cervelle sauter,
Voyez, voyez les Rentiers trembler ;
(Chœur) : Hourra, cornes-au-cul, vive le Père Ubu !

Aussitôt suis lancé par-dessus la barrière,
Par la foule en fureur je me vois bousculé
Et j’ suis précipité la tête la première
Dans l’grand trou noir d’ous qu’on n’ revient jamais.

Voilà c’ que c’est qu’ d’aller s’ prom’ ner l’ dimanche
Rue d’ l’Echaudé pour voir décerveler,
Marcher l’ Pinc’-Porc ou bien l’ Démanch’-Comanche,
On part vivant et l’on revient tudé.

Voyez, voyez la machin’ tourner,
Voyez, voyez la cervell’ sauter,
Voyez, voyez les Rentiers trembler ;
(Chœur) : Hourra, cornes-au-cul, vive le Père Ubu !


Alfred Jarry, Charles Pourny, Claude Terrasse
Ubu roi, V, 4, 1888, édition 1900

 

 

Sources

 

Ubu roi, 1888, édition 1900

 

* * *

 

Vive le Père Ubu ! Promesse faite à des pas perdus.

 

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19 janvier 2013 6 19 /01 /janvier /2013 00:01

 

 Arno, Future vintage

Arno, Future Vintage, naïve, 2012

 

 

A. Hintjens / A. Hintjens – S. Feys, Chanson d'amour, Future Vintage

 

 Arno

 

Arnold Charles Ernest Hintjens est un auteur-compositeur-interprète belge né le 21 mai 1949 à Ostende. Il chante en anglais, en français, en néerlandais ou en patois flamand.

 

Une voix manière Higelin, sa référence, une gorge rauque à la Tom Waits, un rock déclinqué, des rimes qui ne riment pas.

Une énergie calme, sans illusion.

Une révolte aigre-douce.

 

Jean Genet, Un chant d'amour, 1950 – sortie, différée par la censure, en 1975, direction de la photographie : Jacques Natteau, Jean Cocteau (non crédité), musique : Gavin Bryars.

 

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13 janvier 2013 7 13 /01 /janvier /2013 00:01

 

 Henry Edward Helseth, Un aller simple

Henry Edward Helseth, The Chair for Martin Rome, 1947, Un aller simple, Gallimard, Série noire n° 65, 1950, traduit de l'américain par Jean Rosenthal et Minnie Danzas

 

 Henry Edward Helseth

Henry Edward Helseth

 

Henry Edward Helseth est né en 1912 dans le Minnesota. Il est l'auteur de romans policiers dont un seul a été traduit en français, Un Aller Simple, considéré par Jean-Pierre Melville comme, appartenant à « la très, très grande littérature », un « grand chef-d’œuvre » (Le policier de poche, 1967).

José Giovanni a porté le roman à l'écran en 1971.

 

 

Otto Preminger, River of No Return, 1954, chansons : Ken Darby / Lionel Newman, int. Marilyn Monroe

 

 

José Giovanni / François de Roubaix, Un aller simple, 1971, int. Gilles Dreu

 

Une tragédie antique : le héros inspire crainte et pitié (φόβος και έλεος), il est mené par une fatalité implacable qu'il ne peut que suivre, volontairement, jusqu'à la mort.

 

L'infirmière s'était rendu compte qu'il ne dormait pas.

[…]

Dans la matinée du 8 septembre, Martin Rome et Thomas Mills avaient tenté de cambrioler la Citizens First National Bank & Trust Company. Ils avaient été pris en flagrant délit par l'officier de police Harold Mac Ready. Suivit un échange de coups de feu. Mac Ready fut abattu, après avoir tué Thomas Mills et blessé Martin Rome.

 

Marty sait qu'il va être condamné à mort. Harvey Niles, un avocat, un faisan, lui propose d'endosser le meurtre prétendument commis par un certain Whitey Legget, en échange d'une protection donnée à Teena, l'amie de Marty : il refuse et s'évade pour retrouver le vrai coupable. Il y parvient. Son destin est accompli.

 

Au cours de sa cavale en quête du tueur inconnu, Martin se rend chez Harvey Niles. Une bagarre éclate. Niles reçoit une balle de l'arme avec laquelle il menaçait son visiteur. Avant de mourir, il a eu le temps de dire :

Tout seul, vous êtes foutu.

[…]

Le quartier des condamnés à mort comprenait seize cellules. Onze d'entre elles étaient occupées. Celle de Martin Rome portait le numéro six.

[…]

La voix de l'aumônier Berglund s'éleva, d'abord chétive, puis plus ferme lorsque le jeune prêtre se joignit à l'oraison :

_ … Notre Père qui êtes aux cieux...

FIN

 

* * *

 

José Giovanni / François de Roubaix, Un aller simple, 1971

 

Sur le chemin des sans avenir

Tous les hasards mènent à bon port

Mon port à moi c'est la jeune mort

On y jette l'argent par les fenêtres

 

Que l'on soit beau, que l'on soit moche

On est tout seul dans son cercueil

En oripeaux ou en galoches

Dans un linceul, y'a pas de poche

 

Sur le chemin des sans avenir

L'amour surgit à l'aube

Et jamais plus je ne l'oublierai

Cette douceur du temps d'aimer

 

Que l'on soit beau, que l'on soit moche

On est tout seul dans son cercueil

En oripeaux ou en galoches

Dans un linceul, y'a pas de poche

 

Sur le chemin des sans avenir

Tous les hasards mènent à bon port

Mon port à moi c'est la jeune mort

On y jette sa vie par les fenêtres

 

Que l'on soit beau, que l'on soit moche

On est tout seul dans son cercueil

En oripeaux ou en galoches

Dans un linceul, y'a pas de poche

 

Sur les cargos, mes rêves d'enfant

N'ont jamais fait naufrage

Mes rêves d'enfant sont de retour

Mais il est un voyage dont on ne revient pas

 

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