Charles Trenet, Ménilmontant, 1939
On se souvient de Lou, Le petit Parisien.
On le reconnaît ici, dans son quartier embaumé de lilas aux premiers beaux jours.
Robert Doisneau, Les Lilas de Ménilmontant, 1956
Charles Trenet, Ménilmontant, 1939
On se souvient de Lou, Le petit Parisien.
On le reconnaît ici, dans son quartier embaumé de lilas aux premiers beaux jours.
Robert Doisneau, Les Lilas de Ménilmontant, 1956
Le débat induit par Jimidi sur la passoire pliante, nous a entraînés, par la grâce de Mélanie (de Tours), vers la folle complainte de Charles Trenet, une pièce rare et mystérieuse.
Charles Trenet, La Folle complainte, 1945 – int., 1999, in album A Pleyel
Les jours de repassage,
Dans la maison qui dort,
La bonne n'est pas sage
Mais on la garde encore.
On l'a trouvée hier soir,
Derrière la porte de bois,
Avec une passoire, se donnant de la joie.
La barbe de grand-père
A tout remis en ordre
Mais la bonne en colère a bien failli le mordre.
Il pleut sur les ardoises,
Il pleut sur la basse-cour,
Il pleut sur les framboises,
Il pleut sur mon amour.
Je me cache sous la table.
Le chat me griffe un peu.
Ce tigre est indomptable
Et joue avec le feu.
Les pantoufles de grand-mère
Sont mortes avant la nuit.
Dormons dans ma chaumière.
Dormez, dormons sans bruit.
Berceau berçant des violes,
Un ange s'est caché
Dans le placard aux fioles
Où l'on me tient couché.
Remède pour le rhume,
Remède pour le cœur,
Remède pour la brume,
Remède pour le malheur.
La revanche des orages
A fait de la maison
Un tendre paysage
Pour les petits garçons
Qui brûlent d'impatience
Deux jours avant Noël
Et qui,sans méfiance,
Acceptent tout, pêle-mêle :
La vie, la mort, les squares
Et les trains électriques,
Les larmes dans les gares,
Guignol et les coups de triques,
Les becs d'acétylène
Aux enfants assistés
Et le sourire d'Hélène
Par un beau soir d'été.
Donnez-moi quatre planches
Pour me faire un cercueil.
Il est tombé de la branche,
Le gentil écureuil.
Je n'ai pas aimé ma mère.
Je n'ai pas aimé mon sort.
Je n'ai pas aimé la guerre.
Je n'ai pas aimé la mort.
Je n'ai jamais su dire
Pourquoi j'étais distrait.
Je n'ai pas su sourire
A tel ou tel attrait.
J'étais seul sur les routes
Sans dire ni oui ni non.
Mon âme s'est dissoute.
Poussière était mon nom.
Où l'on retrouve les elfes, les amours, les démons de Charles Trenet - - -
Un ange s'est caché
Il pleut sur mon amour
Il est tombé de la branche
Le gentil écureuil
En compagnie de Gérard Jugnot, Daniel Prévost, Annie Grégorio...
Jean-Michel Ribes, Musée Haut Musée Bas - Les Impressionnistes, 2007
Jean-Michel Ribes, Musée Haut Musée Bas – Le Parking, 2007
The Albemarle Ramblers - Arnie Naiman, Pete Vigour, Dick Harrington, From Earth To Heaven, March 6, 2010 at Haddenham Ceilidhs, 6 mars 2010
Qui se hisse sur la pointe des pieds ne tient pas debout.
Lao Tseu, Tao Tö King, 24
Un bout de craie. A genoux, on fait le tracé. On se redresse. De la terre on aperçoit le ciel. Le pied droit masque encore le galet. Un élan léger et il se place en 5. A cloche-pied on avance jusqu'en 4 et on laisse le jeu au suivant. Il marque en 6, joli, et monte en 4. Il faudrait passer 5 et 6 d'une lancée. Une poussée sur la pointe droite et... ça passe, on est en 8. L'autre a perdu.
_ Vous êtes venu au monde le trois juin mille neuf cent quarante sept ?
_ Oui, Monsieur le Commissaire.
_ Et perdez cette manie de m'appeler « Monsieur le Commissaire » à chaque détour !
_ Pardonnez-moi, inspecteur, je n'ai pas été informé...
_ … n'ajoutez pas l'insolence ! Venu, donc, à La Ville. Aujourd'hui, vous êtes retiré dans un petit village où vous avez gagné la sympathie de tous les indigènes.
_ Presque tous.
_ Presque-tous. Presque, c'est qui ?
_ Il y a La Mouche, collée à sa fenêtre, de l'autre côté de la petite route, et Les Frères Siamois, en travers du carrefour. Innocentes marionnettes dont Les Sournois tirent les ficelles.
_ Et pourquoi cette palissade et ces chaînes qui interdisent maintenant d'entrer chez vous, même des yeux ?
_ Le Ciel, Sganarelle, le Ciel !
_ Le ciel, tu y seras bientôt. Mat en deux coups : le 4 et le 8. Un bond improbable et, de fait, imparable. On va vous conduire à votre case en attendant votre ascension.
_ Vous avez perdu. Votre moustache.
_ … ?
_ Perdue !
_ Je n'ai... jamais... porté... de moustache...
_ LHOOQ...
_ … ?
_ Vous êtes un masque nu à l'ombre de votre moustache, rasée.
Puces
C'était en 1990. Le ci-devant narrateur et son animal de compagnie cheminaient en automobile vers un petit village du Gers, son évêque, ses mousquetaires, sa belle-mère. Le ci-devant narrateur n'était pas pressé d'arriver, et pourtant il aime bien le chant grégorien et les romans de cape et d'épée. Allez comprendre !
A cinquante kilomètres de l'arrivée – souffrance, moment pénible – nous nous arrêtons dans un petit chemin.
Nous allons repartir lorsqu'un beagle Elisabeth vient modérer notre élan : elle est enjouée, elle a faim et elle entretient une colonie de puces. Caresses, biscuits, appel lointain de la belle-mère. Elle a creusé et garni un abri au coin du champ. La chienne, bien sûr. On la voit dans le rétroviseur, elle se tient au milieu de la route. Demi-tour. L'animal de compagnie prend le volant et son maître embarque la chérie et sa grouillante cargaison.
Le plan – purée accélère y'en a partout – est tout tracé : une bassine, de l'eau, du shampoing, une serviette, de quoi grignoter.
_ Milou ditz ! C'est quoi ? Vous avez ung chieng ?
_ Une chienne, elle s'appelle Puces et elle a faim.
Le bain, du pain dur, une écuelle d'eau et une vieille couverture posée derrière le tas de bois – les nuits sont fraîches et seul l'animal de compagnie est autorisé dans la maison.
Un dîner sans appétit. Elle est repartie, sûrement. Le foie gras est insipide et on ne sait que faire des épluchures du magret.
_ C'est l'heure, y te faut y aller. A la boulangerie, sur le parkigng, y font l'omelette norvégienneu, mais dame ! Ça n'attend pas.
Le Grand Nord nous permet d'aller voir ce qu'Elle devient. Elle est sur sa couverture, elle frétille mais reste couchée.
Le chaud-froid est rendu...
Emotions, fatigue, dodo – on se lèvera tôt.
Cinq heures, il fait presque jour. On s'habille, on prend du pain, deux grands torchons – le plan ! - et on descend.
Puces est là. Cette fois, elle s'avance, c'est un nouveau jour. Un torchon autour de la poitrine, l'autre attaché au premier, c'est la laisse. Nous sommes partis. Quelques centaines de mètres le long du petit bois, retour, déménagement vers le local dédié à la chaudière : c'est grand, le sol ne craint rien et elle appréciera cette tiédeur. Son eau et son pain. Caresses et frétillement.
On se prépare un café et deux tartines. Le temps que la cafetière gargouille – FSSHHGURGL PRRUÏT SCRPSCHllIKSSS, on prend un fond de lait et on redescend. Elle est en vadrouille. Puces, bien sûr. Elle explore. En m'entendant verser le lait dans son écuelle, elle accourt en se tortillant et en wooffant : oui, elle parle, elle me remercie, elle me raconte qu'elle a été balancée trois mois auparavant parce qu'elle n'était pas bonne à la chasse, elle me dit qu'elle aime bien les animaux, les lapins, les crapauds, les chats.
Les Chevaliers du Fiel, Chasseurs
Oui, seulement on aime bien le café fraîchement tiré...
Dans la journée, elle accède à la véranda qui tient lieu d'entrée. Les jours suivants, elle reste au pied de la table de jardin sur laquelle ma bibliothèque de voyage est installée, parfois elle monte sur les genoux, elle s'intéresse aux jardins de Fontainebleau et de Navarre qui s'offrent en illustrations et elle entend mieux la musique – une saison The Cure, Metallica et Trent Reznor. Quelques jours plus tard, elle a droit à la cuisine et aux restes.
La voici en compagnie d'Oliver, le premier chat de la présente demeure, avant la collection initiée par Bouchon.
Oliver & Puces
Oliver
Oliver & Puces
Ensuite, attendez-vous à voir et vous verrez.
Mra, un normand, le tout premier
Stéphanie, Mra, Lioucha
Stina, Stéphanie
Quand Lioucha fut recueillie, Stina de la Caterie avait déjà disparu suite aux bons soins d'un certain Tartignol qui avait confondu la maladie de Carré et une crise d'urticaire entre deux paquets d'affiches à coller : sa carrière politique commençait.
Et encore, et encore, et on en laisse à la diligence de votre recherche dans Libellus. IL est partout, on l'aime tant.
Stina, 3 mois
Stina, 8 ans, peu avant sa mort
Stina, 8 ans
Vous rêviez depuis longtemps de ce voyage à Beverly Hills.
Comme vous aviez choisi la classe Salon dans un Airbug A666, vous avez été conduit par une passerelle roulante à l'entrée située en tête de l'aéroplane.
Introibo ad altare
Le commandant Antoine de, un retraité de La Poste, vous a souhaité la bienvenue.
Et cum spiritu tuo
Peu de temps après le décollage, l'écran géant vous a présenté un film de divertissement : Aircrash.
Perducat vos ad vitam aeternam
Introit
Nicolas Sarkozy à Tripoli, le 25 juillet 2007
Libya (Λιβύη), L'Alibi
Fra Angelico, Bacio di Giuda, fresque, circa 1450, San Marco, Florence
Quelqu'un qui a plongé avec moi la main dans le plat, voilà celui qui va me livrer !
Mt, 26, 23 (trad. Bible de Jérusalem)
Celui à qui je donnerai un baiser, c'est lui ; arrêtez-le.
Mt, 26, 48 (trad. Bible de Jérusalem)
Requiem aeternam dona eis Domine
Nicolas Sarkozy au Salon de l'Agriculture, le 23 février 2008
Les images de la scène ont été rapidement censurées sur Dailymotion.
Et le grand prêtre de Dailymotion, c'est ?
Oui, Benjamin Bejbaum.
Allez en paix, la messe (manière de parler pour les figurants de la page) est dite.
[une réédition du samedi 19 mars 2011]
Le Cimetière de Prague pour gourmets et gourmands : à la carte, menus à prix fixe, recettes.
Au Café Anglais
Soufflés à la reine. Filets de sole à la vénitienne. Escalopes de turbot au gratin. Selle de mouton, purée bretonne.
Poulet à la portugaise ou pâté chaud de cailles ou homard à la parisienne ou tout à la fois.
Canetons à la rouennaise ou ortolans sur canapés.
Aubergines à l'espagnole. Asperges en branches. Cassolettes princesse.
Château-Margaux ou Château-Latour ou Château-Lafite.
Bombe glacée.
Côtes de veau Foyot
Pour deux : viande épaisse d'au moins quatre centimètres, deux oignons de taille moyenne, cinquante grammes de mie de pain, soixante-quinze de gruyère râpé, cinquante de beurre.
On passe la mie jusqu'à en faire de la chapelure qu'on mélange au gruyère, ensuite on pèle et on hache fin les oignons, on fait fondre quarante grammes de beurre dans une petite casserole tandis que dans une autre on amalgame doucement les oignons et le beurre restant, on recouvre le fond d'un plat avec la moitié des oignons, on assaisonne la viande, sel et poivre, on la pose dans le plat et on en garnit un côté avec le reste des oignons, on recouvre le tout avec une première couche de mie et de fromage en faisant bien adhérer la viande au fond du plat, laisser couler le beurre fondu tout en écrasant légèrement de la main, remettre une autre couche de mie jusqu'à former une sorte de coupole en ajoutant du beurre fondu, arroser le tout de vin blanc et de bouillon, sans dépasser de moitié la hauteur de la viande. Le tout mis au four pendant environ une demi-heure, en continuant d'humidifier avec le vin et le bouillon. Assaisonner avec du chou-fleur sauté.
Chez Philippe, rue Montorgueil
Potage à la Crécy.
Turbot à la sauce aux câpres.
Filet de bœuf et langue de veau au jus.
Sorbet au marasquin, pâtisseries variées.
Un vieux bourgogne, deux bouteilles.
Bagna caöda
Dans un récipient de terre cuite gardé bouillant sur un fourneau alimenté par des braises, où grésillait l'huile enrichie d'anchois, ail et beurre, on trempait les cardons (qui d'abord avaient été plongés un moment dans de l'eau froide citronnée – pour certains, mais pas pour mon grand-père, dans du lait, lui), des poivrons crus ou rôtis, des feuilles blanches de chou frisé, topinambour, chou-fleur très tendre – ou bien (mais, comme disait grand-père, ça c'était pour les pauvres) légumes verts bouillis, oignons, betteraves, patates ou carottes.
Pot-au-feu (grand-père)
Il fallait au moins un demi-kilo de muscle de bœuf, une queue, culotte, saucisses, langue et tête de veau, saucisson frais, poule, un oignon, deux carottes, deux côtes de céleri, un bouquet de persil. Le tout à laisser mijoter des temps variés, selon le type de viande. […] à peine le pot-au-feu dressé sur le plat creux, il fallait répandre une poignée de gros sel sur la viande et y verser plusieurs louches de bouillon brûlant pour en exalter la saveur. Garniture réduite, à part quelques pommes de terre ; mais fondamentales, les sauces, soit : moutarde de raisin, sauce au raifort, moutarde aux fruits de sénevé, mais surtout (grand-père ne transigeait pas) la trempette verte : une poignée de persil, quatre filets d'anchois, la mie d'un petit pain, une cuillère de câpres, une gousse d'ail, un jaune d’œuf dur. Le tout finement broyé, avec huile d'olive et vinaigre.
Bœuf braisé au Barolo (grand-père)
_ Mon fils ne comprendra jamais, disait-il, la beauté de cette macreuse avec oignon, carotte, céleri, sauge, romarin, laurier, clou de girofle, cannelle, genièvre, sel,n poivre, beurre, huile d'olive et, naturellement, une bouteille de Barolo, servi avec polenta ou purée de pommes de terre.
Civet
Avec lard, beurre, farine, persil, demi-litre de Barbera, un lièvre coupé en morceaux gros comme des œufs, cœur et foie compris, petits oignons, sel, poivre, épices et sucre.
Le Cambio
Mystères de la financière, symphonie de crêtes de coq, ris, cervelle et testicules de veau, filet de bœuf, cèpes, demi-verre de Marsala, farine, sel, huile et beurre, le tout rendu aigrelet par une alchimique dose de vinaigre – et, pour le goûter bien à point, il aurait fallu se présenter, comme son nom l'indiquait, en redingote ou stiffelius si l'on préfère.
Agnolotti à la piémontaise...
… farcis de viande blanche rôtie, de viande rouge rôtie, et de bœuf bouilli, poule bouillie désossée, chou frisé cuisiné avec les rôtis, quatre œufs entiers, parmiggiano reggiano, noix muscade, sel et poivre et pour le jus le fond de cuisson des rôtis, beurre, une gousse d'ail, une branche de romarin.
Tortue de mer, comme on en trouve au sud de la Corse
[Alexendre Dumas ***] _ Il y aura du travail. Il faudra d'abord la renverser sur le dos, l'ingénue allongera le cou et nous profiterons de son imprudence pour lui couper la tête, zac, ensuite nous la pendrons par la queue pour la laisser saigner pendant douze heures. Après quoi, nous la renversons de nouveau sur le dos, nous introduisons un fort couteau entre le plastron et la carapace, en faisant bien attention de ne pas perforer le fiel sinon elle devient immangeable, on extrait la vidure et on ne garde que le foie, la bourbe transparente qu'il contient ne sert à rien mais il y a deux lobes de chair qui ont l'air de deux noix de veau aussi bien pour leur blancheur que pour leur saveur. Enfin, nous détachons les membres, le cou et les nageoires, on coupe des morceaux de chair de la dimension d'un cajou, on les fait dégorger, on les met dans un bon consommé, avec poivre, clous de girofle, carottes, thym et laurier et on fait cuire le tout pendant trois ou quatre bonnes heures à feu doux. Pendant ce temps, on prépare des émincés de poulet assaisonnés de persil, ciboule et anchois, on les fait cuire dans le consommé brûlant, ensuite on les passe et on verse dessus la soupe de tortue où nous aurons mis trois ou quatre verres d'un madère sec. S'il n'y avait pas de madère, on pourrait mettre du marsala avec un petit verre d'eau-de-vie ou de rhum. Mais ce serait un pis-aller. Nous dégusterons notre soupe demain soir.
Eau cuite
Il suffisait de mettre des tranches de pain dans une soupière en les assaisonnant avec beaucoup d'huile et du poivre fraîchement mouliné, on faisait bouillir par ailleurs dans trois quarts d'eau salée oignons émincés, filets de tomates et menthe, après vingt minutes de cuisson on versait le tout sur le pain, on laissait reposer deux minutes et zou, servi bien chaud.
La Taverne de Bagheria
Pâtes aux sardines et piscistocco à la gourmande (stockfisch amolli dans l'eau froide pendant deux jours et coupé en filets, un oignon, une branche de céleri, une carotte, un verre d'huile, de la pulpe de tomate, olives noires dénoyautées, pignons, raisin de Corinthe et poire, câpres dessalées, sel et poivre).
Le Grand Véfour...
… sous les portiques du Palais-Royal, Il paraît que Victor Hugo aussi l'a fréquenté, il y venait pour la poitrine de mouton aux haricots blancs.
Le Café Anglais...
… à l'angle de la rue Gramont et du boulevard des Italiens. […] J'y ai découvert les pommes Anna, les écrevisses bordelaises, les mousses de volaille, les mauviettes en cerises, les petites timbales à la Pompadour, le cimier de chevreuil, les fonds d'artichauts à la jardinière, les sorbets au vin de Champagne. A la seule évocation de ces noms, je sens que la vie vaut la peine d'être vécue.
Chez Lapérouse...
… quai des Grands-Augustins, et pas en bas, où l'on servait huîtres et entrecôtes comme autrefois, mais au premier étage, dans un de ces cabinets particuliers où l'on commandait barbue sauce hollandaise, casserole de riz à la Toulouse, aspics de filets de lapereaux en chaud-froid, truffes au champagne, pudding d'abricots à la vénitienne, corbeille de fruits frais, compotes de pêches et d'ananas.
Au Rocher de Cancale, rue Montorgueil
Quelques douzaines de belons, suivies d'une bisque d'écrevisses.
Aspic de filets mignons de perdreaux.
Escalopes de poularde au velouté, mais le plat n'était pas à son goût et il l'avait fait changer pour des filets de poularde piqués aux truffes.
Soufflé à la vanille.
Chez Voisin
[les journées de la Commune : la famine]
On avait abattu tous les animaux exotiques du Jardin des Plantes et, la nuit de Noël, pour qui avait de l'argent à dépenser, chez Voisin on avait offert un menu somptueux à base de consommé d'éléphant, chameau rôti à l'anglaise, daube de kangourou, côtelettes d'ours à la sauce poivrade, terrine d'antilope aux truffes, et chat avec garniture de petits rats de lait – car, désormais, non seulement sur les toits n'apparaissaient plus de moineaux mais souris et rats disparaissaient des égouts.
Au Grand Véfour
Fricassée de poulet Marengo.
Mayonnaises de volaille.
Au Père Lathuile, un petit restaurant à la barrière de Clichy
Poulet sauté.
Tripes à la mode de Caen.
Au Bœuf à la Mode
Mignon d'agneau aux laitues.
Chez Brébant-Vachette
Salade Francilion
On fait cuire des pommes de terre dans du bouillon, on les coupe en rondelles, et quand elles sont encore tièdes on les assaisonne, sel, poivre, huile d'olive et vinaigre d'Orléans, plus un demi-verre de vin blanc, un Château d'Yquem si possible, et on ajoute des herbes aromatiques coupées menu. On fait en même temps cuire au court-bouillon des moules de grande taille (mais accompagnées d'un tiers des pommes de terre seulement) avec une branche de céleri. On mélange ensuite le tout que l'on couvre avec de fines lamelles de truffes cuites au Champagne. Le tout deux heures avant de servir, pour que le plat arrive à table froid comme il convient.
A la carte, menus à prix fixe, recettes sont de vrais morceaux du roman d'Umberto Eco où l'on peut trouver d'autres fils de lecture : le complot universel, celui des Jésuites ou des Francs-Maçons ou des Juifs – ce sont les mêmes ; le lancement de l'affaire Dreyfus ou le faux authentique et l'authentique faux ; la genèse des Protocoles des Sages de Sion, vestige du copier-coller au XIXe siècle. On croise également dans l'histoire un certain Froïde, médecin viennois et bien d'autres personnages illustres.
Première édition des Protocoles des Sages de Sion, parue dans l'ouvrage Le Grand dans le Petit de Serguei Nilus, 1905
Umberto Eco, Il Cimitero di Praga, Bompiani, 2010
Umberto Eco, Le Cimetière de Prague, Grasset & Fasquelle, 2011
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*** Autres menus royaux, en compagnie d'Alexandre Dumas
Bon appétit !
Boris Vian / Alain Goraguer, Pan, pan, pan, poireaux, pomm' de terre, 1955 – int. Maurice Chevalier, 1957
C'est sûr que Gilbert n'y verra pas mieux avec des lunettes noires
_ salut, les p'tits godets, salut Mimile ! Toujou dans l'mille ?
_ salut Popol ! Un blanc-cass ? Avec les olives ?
_ on est pas pour eul chang'ment. T'as vu l'journal ?
_ la politique, moi...
_ … escuse, t'as lu ? Dans eul'commerce, rein y va pus.
_ si les banqu' è voulaient, è pourraient, c'est c'que j'dis.
_ tu y es pas ! Y z'ont pas besoin d'sous, y r'fusent eul' client.
_ ho ! J'le crois pas ! Et pourquoi qu'y disent toujou les banques, hein ?
_ y disent banques comme y diraient impôts – quein, Mimile, tu nos en r'mets un. Si t'écout' tout c'qu'y disent, té prendras bentôt la vièl' mimolett' pour eun alèse vagal'.
_ cé quoi vagal ?
_ ça s'voit qu'au château... Cout' ben, tes commerc', y r'fusent eul' client. Cé arrivé à Lou deux fouées en deux jours et jamais deux sans troués, cé lui d'à côté qui l'connaît.
_ c'tait quoi y vendaient ?
_ pisqu'on t'dit qu'y vendent pas, cé des oticiens, où qu'y z'ont des lunettes ! Lou avait passé un coup d'bigophone, tout était fait. Quand il est arrivé à la boutiqu' y z'ont r'fusé d'lui vend' des lunettes ! Deux fouées ! Quand tu compt' eul trajet au prix qu'est l'gazouèl avec leurs tax' tu sais pourquoi tu payes d' z' impots - quein, Mimile, tu nos en r'mets un.
_ y n'ont point l'droit de t'faire un r'fus d'vente, cé la loi !
_ y z'arrangent, y t'font que t'as la catarate ou l'sarcome et qu'y peuv' pas vend' à quéqu'un qu'a quéqu' chose, même que t'aurais l'oeil du perdreau !
_ y sont tous pareils.
_ pas tous, Popol, pas tous, les deux que j'te caus', cé le Criss' et l'Otic de Mimile, de Jony. Après, il est allé chez Lefou, t'sais. Et là, tu sauras jamais. Si qu'tu mont' au front tous les coups qu'y t'fait ses vap', y t'respèt', et, pis qu'ça, cé toi qui yi dit c'que tu veux et y t'fait ta fiche com' tu veux. Pour dire, s'y trouv' 2,25 et qu'tu dis 2, y met 2. Là où 'l'tait prêt de s'trouver mal, cé sur quand t'es myop'. Il a fait y a quéqu'chose, vous êt' limit' entr' eul' 9,5 et 10. Normal ! Que le Lou y a fait, quand j'tais jeun' j'avais 12/10è, j'ai vièli. Et cé r'parti.
Et il a ' pris eun' montur' du Denmark, un pays qu'est 'core passé l'Holland' ! Terrib' les bernic', eun' plume !
_ il est toujou' avec sa Plume ?
_ à c't'heure, è travail' tout' la s'main', eud' 9 heur' à 9 heur', après elle a eun' semain' lib', après è doit fair' les samdi dimanch', cé com' ça.
_ il est quand mêm' fort, le Lou, avec les oticiens !
_ non, l'otiss' 'tait coul', fin d'compt'.
_ ...
_ Mimile, t'as l'artérose du coude ou quoi ?
Chez Mimile - les routes ne sont plus sûres
Chez Mimile_02 – Oursel et Avarie